Travail
Attention! Collègues toxiques!
La téteuse de boss
Toujours soucieuse d'impressionner, elle est prête à tout pour que le patron la voie dans sa soupe et qu'il pense à elle pour tous les projets de l'entreprise. Elle accourt dans son bureau pour signaler ses bons coups, allant parfois même jusqu'à s'attribuer le crédit d'une réussite d'équipe. «Elle a un énorme besoin d'attirer l'attention, signe d'une grande insécurité», note Josée Landry, conseillère d'orientation et conseillère principale chez Fellice Stratégies humaines.
Ce qui la rend toxique: «Si on n'a pas le tempérament pour se mettre en vedette comme elle, on risque de ne pas être reconnue à notre juste valeur et de se retrouver à travailler dans son ombre», dit Josée Landry. Aussi, le fait qu'elle accapare le boss peut le rendre moins disponible pour le reste de l'équipe. «Ultimement, elle peut nous écarter des possibilités de promotion», souligne Sylvie Lepage, conseillère en ressources humaines et présidente d'Innovation RH.
Comment la court-circuiter? «On devrait la féliciter lorsqu'elle fait un bon coup, même si ce n'est guère tentant de lui donner du feed-back positif, conseille Josée Landry. Ça pourrait la calmer. Si elle obtient de la reconnaissance, elle en cherchera peut-être moins auprès du patron.» «On peut aussi la prendre à part et lui signaler qu'on est nous aussi intéressée par tel ou tel projet, suggère Sylvie Lepage. Question de lui rappeler qu'elle n'est pas seule en lice et qu'on voit dans son jeu.»
La diva
Véritable princesse du bureau, elle estime qu'elle mérite une attention et un traitement particuliers. Elle prend tout personnel et elle est très théâtrale dans ses réactions. «Si quelque chose ne fait pas son affaire, elle boude, dit Sylvie Lepage, signe d'un manque de confiance et d'immaturité.»
Ce qui la rend toxique: «Elle force les gens à marcher sur des oeufs, note Ghislaine Labelle. Et ça crée des tensions au sein de l'équipe. De plus, par ses réactions intempestives, elle entretient un niveau de stress élevé.»
Comment la court-circuiter? On trouve une façon diplomate de lui parler «en la flattant dans le sens du poil, propose Josée Landry. S'il faut lui mentionner une erreur, on commence par des commentaires positifs: "Je sais que tu travailles fort, que tu y mets beaucoup d'heures et je l'apprécie, mais j'ai une petite chose à te souligner..." et on formule nos commentaires de manière constructive. L'idée n'est de ne pas lui faire un reproche, mais de lui relater un fait sans porter de jugement.» «Cela dit, on ne s'empêche jamais de lui adresser une remarque par crainte de la vexer, ajoute Ghislaine Labelle. Ce serait une manière de lui donner du pouvoir.»
Le paresseux
Il a toujours une bonne excuse pour ne pas prendre un mandat. Sa devise: s'en tenir au minimum.
Ce qui le rend toxique: On peut être tentée de faire le travail à sa place pour que les choses avancent, mais on risque d'accumuler beaucoup de frustrations et de s'épuiser à la longue. De plus, en agissant ainsi, «on renforce son comportement puisque les choses se font quand même!» prévient Ghislaine Labelle.
Comment le court-circuiter? Il ne faut surtout pas assumer ses dossiers. «On le laisse se prendre à son propre piège», dit Sylvie Lepage. «S'il n'atteint pas les résultats et ne respecte pas les délais, c'est sa responsabilité, précise Josée Landry. «Entre collègues, on peut aussi faire front commun et le solliciter au lieu d'attendre qu'il se manifeste, ajoute Sylvie Lepage. Lui dire, par exemple: "On te laisse tel dossier et on veut un compte rendu la semaine prochaine."»
La fouineuse
Sa curiosité est sans limite: «T'es partie tôt hier. Ça ne va pas?» «T'as l'air fatiguée ce matin. Qu'est-ce qui se passe?» «Elle n'est pas nécessairement mesquine, note Josée Landry. Elle se préoccupe réellement des autres, et elle pense sincèrement qu'elle peut nous conseiller.» Selon Ghislaine Labelle, certaines fouineuses agissent ainsi parce qu'elles veulent avoir un lien plus chaleureux et amical avec leurs collègues.
Ce qui la rend toxique: Elle nous fait perdre notre temps et le sien en babillage. De plus, «ça devient néfaste si elle utilise les informations recueillies pour commérer ou pour lancer des rumeurs à notre sujet», prévient Sylvie Lepage.
Comment la court-circuiter? «Il faut préciser clairement nos limites», indique Ghislaine Labelle. On peut lui dire: "Je veux bien discuter du travail avec toi, mais pour le reste, ça m'appartient."» Ou: "C'est gentil de te préoccuper de moi, mais je n'ai pas le temps d'en parler maintenant."», renchérit Josée Landry.
Le pessimiste
C'est le collègue qui voit les problèmes avant les solutions. Son leitmotiv: «Ça ne marchera jamais.» Quand on arrive avec une bonne idée, il voit tout de suite les problèmes à venir. Et c'est le champion pour trouver des conséquences dramatiques à toute situation.
Ce qui le rend toxique: Il contamine le moral des troupes. «Ce type de personnalité amène une énergie très négative dans une équipe», dit Sylvie Lepage.
Comment le court-circuiter? «On lui demande sur quoi il se base pour dire que ça ne marchera pas, conseille Josée Landry. Ça peut l'aider à se défaire de sa perception négative.» «Il faut lui prouver, à l'aide d'exemples de réussites, que oui, c'est possible et qu'on y arrivera», ajoute Sylvie Lepage.
Le je-sais-tout
Toujours meilleur que tout le monde, il a tout vu, tout fait et surtout tout réussi partout où il est passé. Ce superman ne rate pas une occasion d'étaler ses connaissances et de parler de ses exploits. «Il a vraiment le sentiment d'être quelqu'un d'exceptionnel qui mérite une attention et une reconnaissance particulières, signale Josée Landry. C'est une personne très ambitieuse, peu à l'écoute des autres.»
Ce qui le rend toxique: Il peut rabaisser nos succès afin que les projecteurs restent tournés vers lui. S'il dénigre notre travail, il peut aussi miner notre confiance. «À la longue, les collègues se sentent inadéquats voire incompétents devant lui», signale Ghislaine Labelle, psychologue organisationnelle au sein du Groupe Conseil SCO et auteure du livre Comment désamorcer les conflits au travail.
Comment le court-circuiter? On ne se laisse pas impressionner. «Il ne faut pas croire aveuglément tout ce qu'il raconte, conseille Josée Landry. On s'intéresse à ce qu'il dit, mais on le questionne pour avoir des détails. Si ce qu'il dit n'est pas fondé, il devra reconnaître qu'il en a mis un peu. Mais s'il est sincère, au final, on peut tirer parti de son expérience et apprendre de ce collègue.»
L'hypercritique
À ses yeux, on n'en fait jamais assez. Pointilleuse à l'extrême, elle trouve toujours à redire, même quand vient le temps d'imprimer le rapport final! «Mais cette ultra-perfectionniste a les mêmes exigences envers elle-même, précise Josée Landry. C'est une insécure qui a besoin de tout savoir et de tout contrôler.»
Ce qui la rend toxique: «Ce genre de collègue s'attarde à des détails superflus et fait perdre beaucoup de temps à ses collègues, note Sylvie Lepage. Elle est épuisante, car elle demande toujours des preuves.» Elle donne aussi l'impression de vouloir diriger et contrôler les autres.
Comment la court-circuiter? «Pour qu'elle ne se perde pas dans les corrections, on lui rappelle les objectifs et le cadre du projet sur lequel on travaille», dit Ghislaine Labelle. «On la ramène à l'importance réelle de ce qu'elle critique, poursuit Josée Landry, en lui demandant ce qui la dérange tant. Elle pourra alors comprendre que ce n'est pas si important... ou nous faire comprendre qu'elle a raison sur certains points.»
À retenir
On en parle au patron?
Oui, si toutes nos stratégies conciliatrices n'ont donné aucun résultat. «L'idée n'est pas de dénoncer le collègue en le traitant de fatigant! estime Ghislaine Labelle, mais d'expliquer en quoi son comportement nous affecte et de proposer de chercher ensemble une solution. Si le patron et l'équipe adoptent une approche commune avec cette personne, ils ont des chances de neutraliser le mauvais comportement.»
Pour en savoir plus
- Gérer les personnalités difficiles, préserver sa bonne humeur au travail malgré les défauts des autres par Nelson Bouchard, Quebecor, 2005, 162 p., 19,95 $.
- Travailler avec des personnes difficiles, par Ros Jay, Village Mondial, 2009, 91 p., 14,95 $.
- Travailler avec des malcommodes, par Ray Lilley, Transcontinental, 2010, 182 p., 24,95 $.