Psychologie

Voici ce que vous devez savoir avant d'essayer le microdosage

Voici ce que vous devez savoir avant d'essayer le microdosage

  Photographe : Shutterstock

Adieu le café, bonjour le LSD et les champignons!

Dans un monde où la recherche du bien-être et de la performance mentale atteint de nouveaux sommets, le microdosage gagne des adeptes.

Cette pratique promet de stimuler la créativité et de diminuer l’anxiété, mais qu’en est-il de son efficacité réelle et des implications légales?

 

La pratique de plus en plus populaire du microdosage veut que l’on consomme régulièrement de très petites doses de substances psychédéliques. Ces doses sont suffisamment faibles pour ne pas provoquer d’effets hallucinatoires marqués, mais assez puissantes pour induire des changements subtils dans la cognition et l’humeur.

«J’ai commencé à pratiquer le microdosage dans l’espoir de mieux gérer mon stress et d’augmenter ma concentration, qui semblait s’effriter depuis l’arrivée de la périménopause, explique Élise, quarantenaire. J’ai lu des témoignages en ligne et consulté des études préliminaires avant de tenter l’expérience avec des champignons à psilocybine, que je me suis procurés – illégalement – sur Internet.» Il faut en effet noter que les substances psychédéliques ne sont pas légales, et que les acheter et les consommer présentent des risques.

Les adeptes du microdosage, tout comme Élise, veulent généralement changer des aspects spécifiques de leur vie quotidienne. Parmi les objectifs les plus fréquemment cités figurent une amélioration de la créativité, de la concentration et des fonctions cognitives ainsi qu’une réduction de l’anxiété et du stress. Certaines personnes se tournent vers le microdosage pour gérer des symptômes assez complexes touchant la santé mentale, comme le syndrome de stress post-traumatique ou la dépression. D’autres encore utilisent ces substances dans l’espoir de soulager des douleurs physiques chroniques.

 

Des recherches limitées

Il est important de noter que, bien que les récits personnels et les communautés en ligne regorgent d’anecdotes sur les avantages du microdosage, la recherche scientifique sur cette pratique reste limitée, en partie à cause des restrictions légales liées à l’utilisation des substances psychédéliques. Au Québec et au Canada, la possession et l’utilisation de ces substances restent largement réglementées, ce qui ajoute une couche de complexité tant pour les chercheurs que pour les personnes intéressées par le microdosage.

En dépit de ces limitations, l’intérêt pour le microdosage continue de croître, alimenté par une curiosité grandissante pour les médecines douces et un désir de comprendre pleinement le potentiel des substances psychédéliques dans le contexte de la santé mentale et du bien-être. «Au début, j’étais sceptique quant aux résultats, raconte Élise, mais je voulais quelque chose de différent des médicaments traditionnels. Les premières semaines, les changements ont été subtils mais, progressivement, j’ai commencé à remarquer que mon esprit semblait plus clair et que je me sentais plus présente dans mes activités quotidiennes.»

 

Substances psychédéliques et sérotonine

«L’un des principaux intérêts scientifiques dans l’étude du microdosage est son action sur le système sérotoninergique du cerveau. Les substances psychédéliques, telles que le LSD et la psilocybine, imitent la sérotonine, un neurotransmetteur clé impliqué dans la régulation de l’humeur, de la perception et de la cognition», explique la Dre Gabriella Gobbi, psychiatre, chercheuse et professeure à l’Université McGill, et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en thérapeutique pour la santé mentale. «En influençant ce système, les microdoses pourraient potentiellement agir sur l’humeur et les processus cognitifs de manière subtile, mais significative.»

En outre, les substances psychédéliques seraient susceptibles d’augmenter la neuroplasticité, c’est-à-dire la capacité du cerveau à former de nouvelles connexions neuronales, ce qui pourrait expliquer certains des effets bénéfiques rapportés. 

Les études réalisées jusqu’à présent se sont principalement basées sur des autoévaluations et des rapports subjectifs d’utilisateurs pour mesurer les effets du microdosage. Certaines d’entre elles révèlent que les personnes qui microdosent le LSD ou la psilocybine rapportent une meilleure humeur et une plus grande ouverture d’esprit, mais aussi une augmentation de l’anxiété et de l’irritabilité. Cependant, ces études souffrent souvent de non-conformité. Par exemple, elles n’incluent pas de groupe placebo. Les attentes des participants peuvent donc influencer leur perception des effets du microdosage. «Il est impératif de mener plus d’études cliniques contrôlées avec placebo pour confirmer les effets réels chez les participants», affirme la Dre Gobbi. Le cadre légal actuel continue toutefois de représenter un obstacle majeur à de telles recherches.

La chercheuse souligne l’importance de la prudence dans l’approche du microdosage: «Nous devons être attentifs aux effets à long terme et aux éventuels risques associés à cette pratique. Il est essentiel de poursuivre la recherche dans ce domaine pour assurer la sécurité et l’efficacité du microdosage.»

«Je suis consciente du débat entourant le microdosage, et je sais que mes expériences sont subjectives. Cependant, pour moi, cette pratique a apporté une nette amélioration à ma qualité de vie.» Élise continue de microdoser avec prudence, en gardant à l’esprit que la recherche scientifique en est encore à ses balbutiements. Mais pour l’instant, les bénéfices qu’elle a ressentis lui donnent envie de continuer.

 

La thérapie psychédélique

La thérapie psychédélique représente un domaine distinct et en pleine expansion dans le traitement des troubles psychiatriques. Contrairement au microdosage, cette approche utilise des doses complètes de substances psychédéliques, telles que le LSD, la MDMA (ecstasy) et la psilocybine, dans un cadre thérapeutique contrôlé et sécurisé. L’objectif principal n’est pas une expérience récréative, mais plutôt un état modifié de conscience facilitant la psychothérapie.

Cette forme de thérapie s’est montrée prometteuse dans le traitement de divers troubles, notamment la dépression, l’anxiété, le syndrome de stress post-traumatique et certaines dépendances. «Ces troubles, qui résistent souvent aux traitements conventionnels, peuvent répondre de manière significative à la thérapie psychédélique», fait remarquer Joe Flanders, psychologue qui se spécialise dans ce genre de thérapie. Des études indiquent que ces substances, lorsqu’elles sont administrées dans un contexte thérapeutique, peuvent aider les patients à accéder à des pensées et à des émotions autrement difficiles à atteindre, facilitant ainsi le processus de guérison.

«L’accompagnement professionnel pendant ces séances est crucial. Les thérapeutes formés offrent un soutien psychologique avant, pendant et après les séances, aidant les patients à intégrer leurs expériences psychédéliques dans le cadre plus large de leur parcours de guérison», indique Joe Flanders. Cette intégration est essentielle si l’on veut que les perspectives gagnées pendant la thérapie produisent des changements durables et bénéfiques.

Les substances psychédéliques utilisées dans ce contexte sont connues pour déclencher des expériences profondément introspectives et parfois spirituelles, ce qui peut aider à recontextualiser les expériences de vie et à apporter une nouvelle compréhension des problèmes psychologiques. Les patients rapportent souvent une réduction significative des symptômes et une amélioration de leur qualité de vie.

 

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Des défis réglementaires

Comme le microdosage, la thérapie psychédélique fait cependant face à des défis réglementaires, en particulier en ce qui concerne l’accès légal aux substances nécessaires. Bien que de plus en plus reconnue comme une option de traitement valable, cette forme de thérapie demande encore une recherche plus approfondie pour établir pleinement son efficacité et son intégration dans les pratiques en santé mentale conventionnelles.

«Dans l’avenir, un changement de réglementation pourrait avoir un impact significatif sur la pratique thérapeutique. Comme l’a montré la légalisation du cannabis à des fins médicales et récréatives, un assouplissement des lois pourrait faciliter la recherche clinique et élargir l’accès des patients à ces traitements innovants», soutient le psychologue Joe Flanders.

 

Au-delà du LSD

Le microdosage ne concerne pas uniquement le LSD. Les chercheurs explorent aussi d’autres substances psychédéliques à faibles doses. On peut penser à la psilocybine, trouvée dans certains champignons hallucinogènes, à la MDMA, composant principal de l’ecstasy, à l’ayahuasca, une concoction de liane utilisée traditionnellement en Amazonie, et à la mescaline, un composé chimique tiré du cactus peyotl.

 

UNIQUE AU QUÉBEC

Depuis janvier 2022, la psilocybine est accessible, au Québec, pour le traitement de la dépression réfractaire par un programme d’accès spécial de Santé Canada. «C’est une grande fierté pour nous de pouvoir offrir cette nouvelle option de traitement à des gens qui ont perdu espoir d’aller mieux, explique le Dr André Do, psychiatre au Service des troubles anxieux et de l’humeur de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal. Mais attention, ce n’est pas fait pour tout le monde! La psilocybine demeure un traitement expérimental qui doit être utilisé dans des circonstances exceptionnelles. Elle s’adresse à des patients déprimés qui sont réfractaires à plusieurs autres modalités.»

 

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DES RISQUES CONSIDÉRABLES

Selon la Dre Gabrielle Gobbi, les substances psychédéliques ne devraient pas être utilisées sans surveillance médicale. Les risques sont trop importants. En voici quelques-uns:

  • Réactivation de traumatismes oubliés avec difficulté à les gérer ou émergence de nouveaux traumatismes;
  • Troubles cardiovasculaires, augmentation de la pression artérielle ou dépression;
  • Psychose, panique ou tristesse profonde.

Les risques de déclencher ces troubles sont plus graves chez les personnes ayant une tendance à la bipolarité ou à la schizophrénie. À ce jour, le risque de dépendance à long terme est encore inconnu.

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