Psychologie

Tu vois un psy, toi?

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Tu vois un psy, toi?

  Photographe : Marie-Eve Tremblay | Collagène.com

Consulter un psychologue peut encore être perçu comme un signe de faiblesse. Pourtant, on a tout à gagner à prendre soin de notre santé mentale, comme en témoigne notre journaliste. 

La journée était belle et claire. Je suis rentrée au boulot à vélo et, pour la première fois en quelques semaines, je n’étais plus terrorisée à l’idée d’être dehors toute seule. Je sentais que le fardeau que je venais de déposer dans le bureau de ma psychologue m’avait soudainement allégée.

«Tu vois un psy, toi?» s’est exclamée une collègue quand j’ai expliqué mon arrivée tardive. Eh oui! Un récent diagnostic d’épilepsie a chamboulé ma vie. Un permis de conduire suspendu, une vie de famille à réorganiser, et surtout, cette maladie et son sale caractère plutôt imprévisible. Alors que mon bonheur était de nature insouciante, je devenais grise, morose, fâchée, même. Mais avais-je vraiment besoin d’aller consulter une psychologue pour ça?

La réticence à consulter, je ne suis pas la seule à la ressentir, m’explique Christine Grou, présidente de l’Ordre des psychologues du Québec.

«J’ai souvent entendu des clients me dire qu’ils avaient honte de venir consulter un psychologue, qu’ils étaient déçus de ne pas avoir réussi à s’en sortir par eux-mêmes, explique-telle. Si on souffre de tachycardie, est-ce qu’on hésite à consulter un cardiologue? Ça devrait être la même chose pour notre mental», ajoute-t-elle.

Marie Josée, une trentenaire qui carbure aux nombreux projets, a d’abord considéré une foule d’options pour s’attaquer à son trouble d’anxiété. «J’ai fait plein de démarches avant de consulter: j’ai lu des bouquins sur l’anxiété, j’ai contacté des lignes d’écoute, mais quand j’ai commencé à avoir de la difficulté à gérer mon anxiété au quotidien, j’ai décidé de contacter un psychologue», raconte-t- elle. Selon elle, il en était temps. «J’avais besoin de discuter avec un spécialiste, de façon régulière, histoire de mieux comprendre d’où mon anxiété venait et comment je pouvais apprendre à mieux vivre avec elle», dit-elle.

Même si le déclic qui nous pousse à consulter varie énormément d’une personne à l’autre, j’ai compris qu’il faut le faire sans tarder. Les premiers jours après ma crise d’épilepsie, mon aîné me demandait souvent si je le reconnaissais. Rapidement, j’ai ressenti une grande culpabilité à l’idée d’imposer à mes enfants une mère malade, imparfaite. Et j’ai eu peur que ces craintes n’engendrent une spirale qui pourrait être véritablement nocive pour toute la famille.

«Un problème de santé psychologique pour lequel on ne consulte pas rapidement peut effectivement engendrer plus de souffrance et un sentiment d’isolement», explique la psychologue. On pense qu’on est assez «forte» pour régler le problème, alors que, dans le fond, ce dont on a besoin, c’est de l’aide d’une personne dont c’est le métier. Et avec qui ça clique, dois-je ajouter... «La relation qu’on développe avec son psychologue, c’est probablement une des relations les plus intimes qu’on vivra avec un professionnel. On lui confie des choses que, parfois, on n’oserait même pas raconter à nos enfants ou à notre conjoint, d’où l’importance de bien le choisir», précise Mme Grou.

Et pour trouver le bon, il faut accepter de magasiner un peu. Le truc de Marie Josée? Téléphoner le soir, dans les bureaux de psychologues. «En écoutant leur message d’absence, je pouvais déjà entendre avec qui ça se passerait mieux. Et comme de fait, la voix calme de ma psychologue — même sur le répondeur! — m’a apaisée. Je savais que je venais de trouver la psychologue qui me convenait», dit-elle. Et si ça ne colle pas, il ne faut pas hésiter à changer, d’après Christine Grou. «Si on ne se sent pas à l’aise avec notre psychologue, on n’arrivera pas à lui confier nos difficultés ou à écouter son analyse de la situation», explique Christine Grou. Mieux vaut changer de psychologue si on voit que ça ne fonctionne pas après quelques séances que de continuer à y aller à reculons et sur la défensive.

J’ai déniché ma psychologue après quelques appels seulement (après avoir arpenté le site de l’Ordre, au ordrepsy.qc.ca). Un peu plus âgée que moi, elle parlait tout doucement, mais elle riait souvent, ce qui m’a automatiquement réchauffé le coeur. Et elle m’a un peu parlé d’elle, pour que je me sente moins seule dans mes confidences. À chacune de nos rencontres, elle m’a aidée à défaire les noeuds qui m’empêchaient de grandir. Elle m’a rassurée tout en me poussant tranquillement à accepter ma maladie un peu plus sereinement.

La semaine dernière, je suis entrée dans son bureau en sentant que ce serait la fin, que la plaie se refermait bien, que la cicatrice laisserait bien peu de marques au final. Et quand il a été temps de se dire au revoir, elle m’a gentiment rappelé que sa porte demeurerait ouverte, toujours. Elle m’avait accueillie affaiblie et désemparée, elle me laissait maintenant repartir plus forte et plus confiante.

Journaliste (et épileptique!), Julie Roy consulte parfois une psychologue, mais aussi une neurologue, une gynécologue et une médecin de famille (la chanceuse!).

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