Psychologie
Naître à Noël, vraiment un cadeau?
Photographe : Marie-Eve Tremblay | Colagene.com
Une montagne de cadeaux, une ambiance magique, des plats concoctés avec amour, toute la parenté qui se rassemble afin de partager un bon moment... Célébrer son anniversaire en même temps que Noël, est-ce une bénédiction ou un cauchemar?
Née le 25 décembre 1963, Nathalie Fortin a presque toujours adoré sa date d’anniversaire: «Tout le monde est en congé et de bonne humeur. L’ambiance est festive avec les décorations, les sapins, les repas copieux... Célébrer mon anniversaire après une journée au travail ou pendant les vacances de juillet, ce serait tellement moins amusant!» Elle conserve de précieux souvenirs de ces doubles festivités. Aucun manque de considération, aucun oubli fâcheux qui aurait pu lui donner envie de maudire la dinde: «Plus jeune, je recevais un gros cadeau ou encore deux cadeaux, pour bien distinguer les occasions. On me chante toujours “Bonne fête” au réveillon. J’ai un gâteau spécial, et non, ce n’est pas une bûche. On ne m’a jamais vraiment oubliée, au contraire, je suis tellement associée à Noël que tous mes amis m’appellent à minuit top chrono. C’est un beau privilège!»
Elle se souvient toutefois d’une période plus difficile, alors qu’elle était adolescente: «Mes neveux et nièces étaient très jeunes. L’attention était centrée sur leur réaction devant les cadeaux, le père Noël... Ma fête passait un peu inaperçue, je n’étais plus le point de mire. Ils ont vieilli, puis ils se sont occupés de l’animation avec des pièces de théâtre thématiques et des jeux. C’est redevenu le fun!»
Nathalie apprécie tellement ses anniversaires sous le gui, qu’un jour elle a décidé d’en célébrer un... en plein été: «Pour mes 50 ans, j’ai organisé un gros party le 25 juillet, qui est le Noël du campeur. Il y avait de la musique de Noël, des guirlandes, des sapins décorés et des flamants roses partout sur le terrain de camping!»
DATE INGRATE
D’autres raffolent un peu moins de cette compétition entre les festivités: «Plus jeune, il était très difficile de fêter avec des amis», se souvient Élise Paquette, née le 24 décembre 1970. «Pour garantir leur présence, il fallait organiser ma fête longtemps d’avance. Même en vieillissant, il est parfois compliqué de glisser mon anniversaire au calendrier: il se fond dans la période des fêtes. On le souligne soit avant, soit après, mais jamais le jour même. Le 24 décembre est consacré au réveillon. Les enfants ouvrent leurs cadeaux, mais pas moi.»
Si ses parents ne l’ont jamais oubliée, ses amis ratent souvent le bateau, pris dans l’étourdissant tourbillon de décembre: «J’y suis habituée!» lance la femme, sans rancune.
«Je ne vois aucun avantage à naître un 24 décembre, conclut-elle. Tu as tous tes cadeaux en même temps, tes amis ne sont jamais disponibles pour une fête. Si ce n’était pas de gâcher le plaisir de ma mère et mes neveux, je passerais cette période à l’extérieur du pays!»
FÊTER TOUS LES JOURS DE L’ANNÉE
Selon le docteur en neurosciences Joël Monzée, nous avons tous besoin de nous sentir vus, entendus et reconnus par notre entourage, surtout au cours de la petite enfance. «Nous avons besoin d’attachement, d’attention bienveillante pour ensuite pouvoir nous détacher, nous responsabiliser ou même partir conquérir le monde, si le cœur nous en dit. Le jour de notre anniversaire est un moment tout indiqué pour consolider cet attachement.»
Le hic? On oublie parfois de vivre pleinement le moment présent, d’être disponible pour l’autre et de se concentrer simplement sur le plaisir de le côtoyer. Le résultat? Une blessure de non-reconnaissance qui peut finir par teinter notre personnalité et nos comportements, plus ou moins consciemment.
«Dans le conte Alice au pays des merveilles, l’auteur Lewis Carroll se questionne sur l’incohérence de fêter une personne uniquement le jour de son anniversaire, alors que tous les autres jours de non-anniversaire semblent si fades, illustre Joël Monzée. Fêtez les personnes qui vous entourent! Tous les jours. Exprimez- leur votre joie qu’ils soient dans votre vie. Nous avons tous besoin de cette part de reconnaissance mutuelle... les 365 jours de l’année!»