Psychologie
Médecine psychosomatique: interaction entre le corps et l'esprit
Tous, nous avons déjà expérimenté des situations où notre corps a réagi à notre esprit. Par exemple, qui n'a pas déjà ressenti son coeur palpiter et ses mains devenir moites devant une situation stressante comme de devoir prendre la parole en public? L'inverse est aussi vrai: notre esprit peut également être influencé par des manifestations physiques. Parlez-en aux personnes qui ont perdu beaucoup de poids, elles vous diront sûrement que leur estime personnelle et leur confiance en elles se sont grandement améliorées.
L'interaction entre le corps et l'esprit n'est pas une théorie nouvelle. Le poète Juvénal, au début du deuxième siècle de notre ère, est l'auteur de la célèbre devise: «Un esprit sain dans un corps sain». Depuis quelques années, les professionnels de la santé et les chercheurs du monde entier, dont plusieurs pratiquent au Québec, s'intéressent de plus en plus à cette relation entre la psyché, qui représente l'ensemble des activités mentales conscientes et inconscientes de l'être humain, et le soma, terme grec qui désigne le corps humain.
Qu'est-ce que la médecine psychosomatique?
À une certaine époque, plusieurs spécialistes parlaient de maladies psychosomatiques. Aujourd'hui, ce concept est totalement révolu et a fait place à celui de la médecine psychosomatique, où les aspects psychiques et physiques de la maladie sont considérés comme un tout indivisible, tel que le souligne le docteur Fabien Gagnon, médecin psychiatre au Centre hospitalier universitaire de Québec (CHUQ) et président de l'Académie canadienne de médecine psychosomatique. «Cette approche donne autant d'importance à l'individu malade qu'à la maladie de cet individu. On s'intéresse donc à la personne dans sa globalité. On cherche à comprendre s'il y a un lien entre les facteurs psychologiques dans la vie de l'individu et le début ou l'exacerbation de certains symptômes physiques.»Dans les milieux hospitaliers québécois, où cette démarche est actuellement mise de l'avant, une partie du travail des psychiatres formés en médecine psychosomatique se fait auprès des patients hospitalisés pour une chirurgie.
«Des études québécoises ont démontré que les patients ayant subi un infarctus sont plus nombreux à souffrir d'une dépression que la population en général. Si on ne traite pas cette problématique, cela augmente les complications médicales, les patients sont plus fréquemment hospitalisés de nouveau et le taux de mortalité est plus élevé. Notre rôle est d'aider nos collègues à identifier ces cas et, s'il y a lieu, d'intervenir et de les traiter adéquatement. La médecine psychosomatique peut donc influencer favorablement l'évolution de la maladie et le succès thérapeutique», affirme le psychiatre du CHUQ.
Cause à effet
Il n'y a pas que les malades cardiaques qui peuvent bénéficier de cette nouvelle mentalité thérapeutique. On sait que la fréquence des problèmes psychologiques (anxiété, dépression, dépendance, etc.) est presque deux fois plus grande chez les personnes aux prises avec une maladie physique chronique, comme le diabète de type 1 et l'arthrite rhumatoïde. Pourtant, selon le docteur Gagnon, la très grande majorité de ces problèmes psychologiques passent inaperçus. «Quatre-vingt-neuf pour cent de ces cas ne sont pas identifiés. Et c'est très significatif pour notre système de santé, puisqu'une étude effectuée dans un HMO (Health Maintenance Organization) de l'Oregon conclut que les personnes aux prises avec des problèmes psychologiques sont généralement de grands utilisateurs de services spécialisés. De plus, ils sont plus à risque de développer, éventuellement, un problème cardiaque tel qu'un infarctus du myocarde.»
Autre avantage d'une telle médecine pour le système de santé: une durée de séjour moins longue. «Par exemple, si on est capable d'identifier les facteurs de stress qui préoccupent le patient avant une intervention chirurgicale, on diminue le risque de complications comme le délirium, ce qui a pour effet d'écourter la durée des séjours», ajoute le psychiatre.Le docteur Jean-Charles Crombez est psychiatre au CHUM-Hôpital Notre-Dame. Depuis 1983, ce spécialiste propose la méthode ECHO, une approche d'intervention psychosomatique qui permet aux personnes atteintes de maladies physiques et psychologiques de maximiser leurs processus naturels de guérison.
Selon ce médecin, nous possédons tous en nous des processus de guérison naturels qui nous permettent de combattre diverses maladies physiques et psychologiques. Lorsque ces processus psychosomatiques naturels sont amoindris ou affaiblis, nous devenons plus vulnérables aux différents traumatismes, microbes, bactéries, infections, etc. Pour maintenir ces processus à leur plein potentiel, le docteur Crombez croit qu'il faut s'occuper de ce qu'il appelle le «mal-être», ces situations du quotidien qui nous immobilisent dans le doute, l'impasse et l'isolement.
Que ce soit une situation de couple tendue, un emploi non satisfaisant ou une relation difficile avec notre ado, toutes ces situations ont des répercussions sur nous, autant sur le plan physiologique que psychologique. «Lorsque nous sommes en situation de mal-être, nous ne réfléchissons plus, nous ne rêvons plus et nous n'imaginons plus. Tout se dégrade aussi sur le plan physiologique: les hormones, les processus immunitaires, etc. Avec ECHO, on agit directement sur le mal-être et les processus de guérisons naturels se remettent en marche. Nous sommes alors moins vulnérables aux différentes maladies», explique le psychiatre. À noter: la méthode ECHO est enseignée dans le cadre de sessions d'apprentissage d'environ 15 heures et peut être suivie en groupe ou individuellement.
La solution à toutes les maladies?
Les deux experts consultés s'entendent pour dire que le fait de soigner adéquatement les problèmes psychologiques ou le «mal être» peut avoir des effets préventifs, et même curatifs. Toutefois, ils font les mises en garde suivantes: «Si on a le cancer ou le psoriasis, on ne se guérira pas avec la méthode ECHO. Absolument pas! On va d'abord être mieux avec soi-même et du coup, on ne sera pas aussi submergé par les maladies présentes. Éventuellement, ça aura un effet sur les symptômes et sur la maladie, mais rien n'est prévisible. Ça n'agit pas comme une pilule, ce n'est pas un traitement direct», prévient le docteur Crombez. «Lorsqu'on se préoccupe de l'aspect psychologique, ça ne garantit pas à 100 % qu'on ne sera pas malade, mais ça diminue nos risques», conclut le docteur Gagnon.
Au XVIIIe siècle, l'écrivain et philosophe français Voltaire disait qu'il avait décidé d'être heureux, car cela le gardait en santé. Une maxime à se répéter trois fois par jour, avant les repas!
Pour en savoir davantage:
L'approche ECHO
Suggestion de lecture:
Le plus récent livre du Dr Jean-Charles Crombez, La méthode en ECHO – Guérir le mal-être, publié en avril 2007 aux Éditions de l'Homme.
L'interaction entre le corps et l'esprit n'est pas une théorie nouvelle. Le poète Juvénal, au début du deuxième siècle de notre ère, est l'auteur de la célèbre devise: «Un esprit sain dans un corps sain». Depuis quelques années, les professionnels de la santé et les chercheurs du monde entier, dont plusieurs pratiquent au Québec, s'intéressent de plus en plus à cette relation entre la psyché, qui représente l'ensemble des activités mentales conscientes et inconscientes de l'être humain, et le soma, terme grec qui désigne le corps humain.
Qu'est-ce que la médecine psychosomatique?
À une certaine époque, plusieurs spécialistes parlaient de maladies psychosomatiques. Aujourd'hui, ce concept est totalement révolu et a fait place à celui de la médecine psychosomatique, où les aspects psychiques et physiques de la maladie sont considérés comme un tout indivisible, tel que le souligne le docteur Fabien Gagnon, médecin psychiatre au Centre hospitalier universitaire de Québec (CHUQ) et président de l'Académie canadienne de médecine psychosomatique. «Cette approche donne autant d'importance à l'individu malade qu'à la maladie de cet individu. On s'intéresse donc à la personne dans sa globalité. On cherche à comprendre s'il y a un lien entre les facteurs psychologiques dans la vie de l'individu et le début ou l'exacerbation de certains symptômes physiques.»Dans les milieux hospitaliers québécois, où cette démarche est actuellement mise de l'avant, une partie du travail des psychiatres formés en médecine psychosomatique se fait auprès des patients hospitalisés pour une chirurgie.
«Des études québécoises ont démontré que les patients ayant subi un infarctus sont plus nombreux à souffrir d'une dépression que la population en général. Si on ne traite pas cette problématique, cela augmente les complications médicales, les patients sont plus fréquemment hospitalisés de nouveau et le taux de mortalité est plus élevé. Notre rôle est d'aider nos collègues à identifier ces cas et, s'il y a lieu, d'intervenir et de les traiter adéquatement. La médecine psychosomatique peut donc influencer favorablement l'évolution de la maladie et le succès thérapeutique», affirme le psychiatre du CHUQ.
Cause à effet
Il n'y a pas que les malades cardiaques qui peuvent bénéficier de cette nouvelle mentalité thérapeutique. On sait que la fréquence des problèmes psychologiques (anxiété, dépression, dépendance, etc.) est presque deux fois plus grande chez les personnes aux prises avec une maladie physique chronique, comme le diabète de type 1 et l'arthrite rhumatoïde. Pourtant, selon le docteur Gagnon, la très grande majorité de ces problèmes psychologiques passent inaperçus. «Quatre-vingt-neuf pour cent de ces cas ne sont pas identifiés. Et c'est très significatif pour notre système de santé, puisqu'une étude effectuée dans un HMO (Health Maintenance Organization) de l'Oregon conclut que les personnes aux prises avec des problèmes psychologiques sont généralement de grands utilisateurs de services spécialisés. De plus, ils sont plus à risque de développer, éventuellement, un problème cardiaque tel qu'un infarctus du myocarde.»
Autre avantage d'une telle médecine pour le système de santé: une durée de séjour moins longue. «Par exemple, si on est capable d'identifier les facteurs de stress qui préoccupent le patient avant une intervention chirurgicale, on diminue le risque de complications comme le délirium, ce qui a pour effet d'écourter la durée des séjours», ajoute le psychiatre.Le docteur Jean-Charles Crombez est psychiatre au CHUM-Hôpital Notre-Dame. Depuis 1983, ce spécialiste propose la méthode ECHO, une approche d'intervention psychosomatique qui permet aux personnes atteintes de maladies physiques et psychologiques de maximiser leurs processus naturels de guérison.
Selon ce médecin, nous possédons tous en nous des processus de guérison naturels qui nous permettent de combattre diverses maladies physiques et psychologiques. Lorsque ces processus psychosomatiques naturels sont amoindris ou affaiblis, nous devenons plus vulnérables aux différents traumatismes, microbes, bactéries, infections, etc. Pour maintenir ces processus à leur plein potentiel, le docteur Crombez croit qu'il faut s'occuper de ce qu'il appelle le «mal-être», ces situations du quotidien qui nous immobilisent dans le doute, l'impasse et l'isolement.
Que ce soit une situation de couple tendue, un emploi non satisfaisant ou une relation difficile avec notre ado, toutes ces situations ont des répercussions sur nous, autant sur le plan physiologique que psychologique. «Lorsque nous sommes en situation de mal-être, nous ne réfléchissons plus, nous ne rêvons plus et nous n'imaginons plus. Tout se dégrade aussi sur le plan physiologique: les hormones, les processus immunitaires, etc. Avec ECHO, on agit directement sur le mal-être et les processus de guérisons naturels se remettent en marche. Nous sommes alors moins vulnérables aux différentes maladies», explique le psychiatre. À noter: la méthode ECHO est enseignée dans le cadre de sessions d'apprentissage d'environ 15 heures et peut être suivie en groupe ou individuellement.
La solution à toutes les maladies?
Les deux experts consultés s'entendent pour dire que le fait de soigner adéquatement les problèmes psychologiques ou le «mal être» peut avoir des effets préventifs, et même curatifs. Toutefois, ils font les mises en garde suivantes: «Si on a le cancer ou le psoriasis, on ne se guérira pas avec la méthode ECHO. Absolument pas! On va d'abord être mieux avec soi-même et du coup, on ne sera pas aussi submergé par les maladies présentes. Éventuellement, ça aura un effet sur les symptômes et sur la maladie, mais rien n'est prévisible. Ça n'agit pas comme une pilule, ce n'est pas un traitement direct», prévient le docteur Crombez. «Lorsqu'on se préoccupe de l'aspect psychologique, ça ne garantit pas à 100 % qu'on ne sera pas malade, mais ça diminue nos risques», conclut le docteur Gagnon.
Au XVIIIe siècle, l'écrivain et philosophe français Voltaire disait qu'il avait décidé d'être heureux, car cela le gardait en santé. Une maxime à se répéter trois fois par jour, avant les repas!
Pour en savoir davantage:
L'approche ECHO
Suggestion de lecture:
Le plus récent livre du Dr Jean-Charles Crombez, La méthode en ECHO – Guérir le mal-être, publié en avril 2007 aux Éditions de l'Homme.