Psychologie

La jeunesse n'a pas d'âge

La jeunesse n'a pas d'âge

Rachel C�t� Photographe : Rachel C�t� Auteur : Coup de Pouce

Thérèse Michaud, 82 ans: une femme impliquée

Guidée par son ouverture d'esprit, sa curiosité et ses qualités de leader, Thérèse Michaud considère que nous avons une mission à remplir à tous les âges de notre vie. À 82 ans, la fondatrice et présidente du regroupement Les Retraités flyés déborde de vitalité.

Retraitée depuis plus de 20 ans, cette femme d'action fait du bénévolat et parcourt le monde. Au cours des dernières années, elle a participé à des projets d'aide humanitaire en Israël, au Sénégal et au Moyen- Orient. «J'ai fait des voyages dans les 5 étoiles avec mon mari, mais ce que j'aime le plus quand je vais ailleurs, c'est de rencontrer la vraie communauté. » Pour Mme Michaud, rien n'est plus enrichissant qu'aller à la rencontre de l'autre, peu importe les différences socio-culturelles.

Ce désir profond de créer des liens, elle le transmet depuis 18 ans au sein des Retraités flyés. «Selon moi, pour vivre une belle vieillesse, il faut s'impliquer dans son milieu. Avec les Flyés, j'encourage le réseautage chez les retraités. Ensemble, on monte des projets qui peuvent faire une différence, particulièrement auprès des démunis et des personnes âgées en résidence.» Que ce soit pour donner des cours de danse orientale ou pour animer une causerie sur les souvenirs d'enfance, Thérèse Michaud ne compte pas ses heures lorsqu'il est question d'offrir son temps à ces gens qui, souvent, souffrent de solitude. Et les projets ne manquent pas. «Des idées, j'en ai toujours! Je suis incapable de m'arrêter! » Elle organise aussi des ateliers d'écriture et en profite pour écrire les événements qui ont ponctué sa vie, récits qu'elle «relira lorsqu'elle sera vieille» et qu'elle offrira ensuite à ses enfants et à ses petits-enfants.

Son inspiration? Sa marraine, décédée à 105 ans. «Cette femme était extraordinaire. À la fin de sa vie, alors qu'elle vivait en résidence pour personnes âgées, elle marchait dans les corridors et pulvérisait du parfum dans l'ouverture des portes de ses voisines. La chose la plus importante qu'elle m'a enseignée, c'est de ne jamais être motivée par la peur. Selon elle, c'est la peur qui fait mourir le monde: les gens ont peur d'être malades, de manquer d'argent, de perdre leur conjoint... Finalement, ils meurent de peur!» Aux jeunes, Thérèse Michaud souhaite dire que la vieillesse, c'est un cadeau de la vie. «J'ai 82 ans. Des gens meurent à 50 ou 60 ans. C'est une chance, un privilège, de vieillir. Oui, les traits se plissent avec les années et on perd en fraîcheur, mais il suffit de mettre un sourire sincère sur son visage pour l'illuminer.»

À propos de la santé qui se dégrade souvent en vieillissant, Thérèse Michaud se montre pragmatique: «À 70 ans, j'ai réalisé un rêve: je suis partie faire le pèlerinage de Compostelle. Le défi de marcher 28 km par jour ne me faisait pas peur. Je ne ressentais même pas la fatigue à la fin de mes journées! À mon grand étonnement, j'ai fait un infarctus en cours de trajet. Mais après mon hospitalisation, je me suis remise en forme et cette embûche ne m'a pas ralentie dans la poursuite de mes projets et de mes activités. Tant qu'on est capable de parler et de marcher, on a le devoir de se tenir debout, d'émettre nos opinions, d'aller à la rencontre des autres et de continuer à apprendre.»

Nathalie Langevin, 79 ans: toujours aussi active

Elle déambule attentivement devant les oeuvres d'une étudiante de l'École supérieure de mode de l'UQAM, dont elle est l'une des fondatrices et où elle a été professeure et directrice jusqu'à sa retraite, à 65 ans. Elle continue d'y offrir du temps comme bénévole. Parmi les invités du vernissage, plusieurs anciens étudiants viennent l'embrasser et prendre de ses nouvelles. Elle se souvient du nom de chacun.

En feuilletant l'agenda de Nathalie Langevin, on ne peut que se sentir inspirée et se dire qu'on veut vieillir exactement comme elle: cours de peinture, vernissages, sorties au théâtre, lunchs avec des copines, réunions... Sans oublier la planification d'un prochain voyage de cinq semaines en Espagne. Pourtant, Mme Langevin ne renie pas son âge. Elle adore célébrer son anniversaire et a particulièrement hâte au prochain. «Je vais avoir 80 ans, vous réalisez la chance que j'ai?» lance-t-elle, amusée.

Nathalie Langevin ne l'a pourtant pas eue facile ces dernières années: opérée pour un cancer du sein il y a quatre ans, elle est devenue veuve deux ans plus tard. Deux épreuves colossales qu'elle a su traverser avec courage et dignité, sans jamais s'apitoyer ni se laisser abattre. «Ne nous racontons pas d'histoires: à mon âge, on côtoie la maladie et la mort de plus près. Des funérailles, j'en ai presque à chaque semaine! Mais ce n'est pas une raison pour arrêter d'avoir des projets, bien au contraire! Il faut se faire une carapace contre la morosité et continuer de savourer pleinement la vie puisqu'on a le privilège d'être encore vivant!»

Elle est douée pour le bonheur et naturellement portée vers l'esthétique, et son allure reflète son état d'esprit. Nathalie Langevin croit que les personnes âgées devraient renouveler occasionnellement leur style vestimentaire, selon leur budget. «Porter des vieux vêtements démodés, c'est mauvais pour l'estime de soi.»

Les voyages sont l'un des grands bonheurs de Nathalie Langevin. Très souvent, elle part avec des amis. Elle aime notamment faire découvrir Paris, où elle se sent comme chez elle, à des gens qui n'y sont encore jamais allés. Une autre source de plaisir dont elle ne peut se passer, c'est de recevoir son monde à souper: ses amies, son fils, ses petits-enfants. «Je suis très bien entourée. J'ai beaucoup de copines. Certaines sont mes amies depuis la jeune vingtaine! On n'a absolument pas le temps de s'ennuyer. Si j'ai un conseil à donner aux jeunes femmes, c'est celui-ci: entretenez vos amitiés. C'est une richesse inestimable qui vous suivra toute votre vie!» Cette solidarité féminine, Nathalie Langevin l'a toujours considérée comme une priorité, elle qui, dans sa jeunesse, a milité dans les mouvements féministes, notamment pour inciter les femmes à voter indépendamment des convictions politiques de leur mari.

Comment Nathalie Langevin envisage- t-elle l'avenir? Elle souhaite avoir une vie active le plus longtemps possible et espère avoir le bonheur de connaître ses arrière-petits-enfants.

Madeleine Trempe, 88 ans: aimer d'abord et avant tout

La fierté maternelle de Madeleine Trempe, mère de quatre garçons et plusieurs fois grand-mère et arrière-grand- mère, est une réelle source de bonheur. Bien ancrée dans le présent, elle entretient une belle complicité avec ses petits-enfants. «Je réussis à être proche d'eux parce que je suis ouverte d'esprit. Malgré les différences immenses qui distinguent nos générations, je ne leur fais pas la morale et je ne les juge jamais. J'ai connu une enfance de pur bonheur et ça me réjouit de les voir réussir leur vie.»

Veuve depuis une décennie, Madeleine a retrouvé l'amour il y a quelques années. Paul, dont elle parle affectueusement en l'appelant son «copain», est dans sa vie depuis maintenant huit ans. «Mais on a fait le choix de ne pas vivre ensemble et c'est très bien comme ça. Paul vient souvent passer quelques jours d'affilée chez moi, mais j'aime mon indépendance. Ça me permet de me retrouver et de faire toutes les choses qui me passionnent», explique-t-elle.

Aujourd'hui encore, Madeleine conduit sa voiture, cuisine tous les jours, joue au bridge et, jusqu'à tout récemment, a donné des conférences sur les soins de la peau. À la voir, maquillée avec goût, fièrement vêtue, la coiffure impeccable, on devine qu'elle a toujours été une très belle femme. D'ailleurs, les photos qui ornent son appartement le confirment. «Ma mère était une reine en talons hauts! C'est elle qui m'a transmis le goût de la coquetterie. » Comment fait-on pour accepter de voir son corps vieillir? «En combattant le vieillissement! Chaque jour de ma vie, j'ai entretenu ma peau, mes muscles, ma souplesse. Je fais des exercices de relaxation qui m'évitent de prendre des pilules pour dormir. Je me maquille et me coiffe quotidiennement. Pas question de me laisser aller! Je n'ai jamais eu recours à la chirurgie ni au Botox: je suis fière d'avoir 88 ans et je n'ai pas l'intention de le renier. Mais attention: assumer son âge ne veut pas dire qu'on se sent vieille. Tout est dans la tête, et lorsqu'on a une attitude positive, on reste jeune de coeur.»

Très sensible au sort des personnes âgées en perte d'autonomie - elle a été bénévole dans une résidence -, elle se considère privilégiée d'être en santé et d'avoir encore toute sa tête et refuse de vivre dans la peur. «La vie, c'est comme une succession de vagues: il faut en saisir la beauté et les opportunités lorsqu'on se trouve en haut, pas dans le creux!»

Quand elle raconte avec enthousiasme de quoi a été remplie sa vie, on constate que Madeleine Trempe ne s'est pas souvent ennuyée. Elle est partie à l'aventure sur tous les continents, a fréquenté les bals, le théâtre et l'opéra. Ses récits sont pimentés d'humour et de fierté, et l'étincelle dans son regard en dit long sur les plaisirs qu'elle a connus. Et l'amour au troisième âge? «C'est très différent, mais c'est tout aussi beau! Avec Paul, je n'ai pas élevé d'enfants, donc l'amour prend une tout autre forme. C'est un intellectuel et un romantique, notre relation est stimulante autant pour l'un que pour l'autre. Il a une belle plume et m'écrit des lettres depuis nos débuts. Je les conserve toutes: elles marquent l'évolution de notre amour.»

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