Psychologie
9 idées toxiques à balayer de sa tête
Avant de balayer les traîneries mentales qui nous encombrent la tête et le coeur, il faut se demander pourquoi on les trimballe encore. «Les pensées nuisibles et négatives viennent souvent de blessures de l'enfance», constate la psychologue Louise Descôteaux. On s'est sentie, humiliée, ridiculisée, mal aimée. On en porte des séquelles, qui s'estompent parfois au fil du temps, mais qui peuvent aussi nous importuner longtemps. Jusqu'à ce qu'on en décide autrement. En effet, «pour introduire le changement, il suffit souvent de vouloir vraiment que les choses changent», note la psychologue.
Sheryl Gaudet, psychothérapeute familiale et conjugale, croit que ces traîneries font partie de vieux schèmes qu'on a intégrés. «Ce sont comme des vieilles cassettes enregistrées par nos parents, nos profs ou la société qui se mettent à jouer toutes seules, nous dictant certaines pensées, attitudes ou comportements.» Pensées tordues ou croyances fausses, ces vieilleries prennent de la place et nous déstabilisent sur le plan émotif, ajoute-t-elle. «Il faut savoir les reconnaître, car non seulement elles nous gâchent la vie à court terme, mais elles peuvent nous mener à la dépression.»
Prête pour un ménage qui libère le coeur? On sort le balai pour faire de la place. Pour nous inspirer, voici 9 traîneries à balayer.
1. Ce rêve qu'on ne réalisera jamais
On porte toutes de ces rêves qui nous pèsent à mesure qu'on comprend qu'on ne les réalisera jamais. «Depuis très longtemps, je rêve de partir quelques années avec mon mari faire du bénévolat en Afrique. Mais je sais que je ne le ferai pas. Je serais incapable de ne pas voir les enfants pendant tout ce temps», confesse Lyne, qui rumine encore ce rêve qui l'empêche d'être «parfaitement zen», dit-elle.
«On se débarrasse d'un rêve soit en le réalisant, soit en le remplaçant», souligne Louise Descôteaux. Impossible de le concrétiser? On peut d'abord s'interroger sur le sens de ce rêve: est-ce vraiment un projet qui nous tenait à coeur, ou était-ce une façon pour nous de fuir le quotidien quand il devenait trop lourd (rêver de déménager sur une île des Caraïbes quand le boulot devient trop stressant, par exemple)? Si c'était un moyen d'évasion, on peut réfléchir à ce qui cloche dans notre vie et trouver des solutions à ce problème précis. Si notre rêve représentait des valeurs importantes pour nous (probablement la solidarité et le courage dans le cas de Lyne), on peut choisir de les cultiver autrement: ainsi, Lyne pourrait s'engager dans un travail bénévole, suggère Louise Descoteaux. Enfin, une fois le deuil du vieux rêve fait, rien ne nous empêche de nous en trouver un tout neuf, plus conforme à ce qu'on est et à notre réalité. Par exemple, en partant de nos loisirs préférés ou d'une valeur qu'on n'exploite pas suffisamment à notre goût dans notre vie de tous les jours, comme la créativité ou l'ouverture sur le monde.
2. Maudite culpabilité
«Huit ans après sa mort, je culpabilise encore de ne pas avoir découvert plus tôt que maman souffrait de la maladie d'Alzheimer, avoue Jeanne. Après coup, les premiers signes me sont apparus évidents, mais pas sur le moment. Elle a dû se sentir tellement mal. On aurait pu prendre les choses en main plus vite pour l'aider.»
«Oui, mais justement, Jeanne ne le savait pas. Il faut qu'elle se pardonne et qu'elle ne prenne pas sur ses épaules ce qui ne lui appartient pas», note Sheryl Gaudet. «Les gens en deuil se reprochent souvent de ne pas avoir fait ci ou ça, de ne pas avoir dit ci ou ça, remarque Louise Descôteaux. Pour faire la paix - et ça vaut pour toutes les fois où on se sent coupable -, il faut se demander si on a fait notre possible dans le contexte.» C'est en se souvenant des conditions et des circonstances dans lesquelles les choses se sont déroulées qu'on arrive à se pardonner. On a fait notre possible? Alors, on jette, on respire et on passe à autre chose. Difficile? «On s'installe devant un miroir et on se demande, en se regardant bien dans les yeux, si on avait une mauvaise intention en posant tel ou tel geste, dans ce cas-ci, en ne voyant pas plus tôt les symptômes de la maladie. Oui? On plaide coupable, on cherche comment réparer sa faute (bénévolat à la société d'Alzheimer, don à une cause que chérissait notre mère), on répare, puis on se pardonne. Non? On se pardonne tout de suite», suggère la psychologue.
3. Ces vieux relents d'enfance
Nos vieux complexes resurgissent quand on s'y attend le moins, nous paralysant, nous empêchant d'avancer. Pourtant, on devrait les balancer après tout le mal qu'ils nous ont fait. Femme d'affaires aguerrie, Danielle mène une carrière enviable qui l'emmène aux quatre coins du monde. Mais il suffit qu'elle prononce un mot de travers pour redevenir, l'espace d'un instant, la dyslexique qu'elle était enfant. «J'avais un complexe d'infériorité à cause de mes problèmes de lecture et d'écriture. Je me sentais nulle à côté de ma soeur, si brillante.»
Pour faire taire la petite voix de l'enfant malmenée, Louise Descôteaux lui suggère de s'arrêter et de regarder comment elle a fait sa place. Quelles qualités lui ont permis de bâtir sa carrière? Quels bons coups a-t-elle réussis dans sa vie? Quels compliments lui fait-on, quelles forces lui reconnaît-on? Ça ne suffit pas? Chaque soir avant de se coucher, Danielle peut noter cinq moments de la journée où elle s'est sentie intéressante et compétente. Une autre façon de se rappeler qu'elle n'est plus une petite fille dyslexique et qu'elle peut donc mettre son vieux complexe à la poubelle.
4. Les relations troubles avec l'argent
Diane veut se débarrasser de ses rapports houleux à l'argent ou au... manque d'argent. Elle souhaiterait dépenser moins et s'inspirer davantage de la philosophie de la simplicité volontaire. «Mais je n'arrive pas toujours à endiguer l'influence néfaste de cet outrageux étalage de biens de consommation. On a toujours besoin de quelque chose...» dit-elle. Alors, après avoir compté et été sage, elle se laisse aller. Et tout est à recommencer...
«Les rapports à l'argent ont à voir avec l'amour, la sécurité, le pouvoir», souligne Louise Descôteaux. Diane doit observer quand surviennent ces vagues de dépenses et pourquoi. Qu'est-ce qui se cache derrière l'argent? «Le fait d'être serrée financièrement est aussi une façon de se couper de ses rêves, une excuse pour ne pas bouger. À elle de voir à quoi ça lui sert.» Sheryl Gaudet l'invite à se faire aider et à se munir de bons outils: conseils financiers, cours de budget à l'ACEF. Pour mieux contrôler ses impulsions, Diane peut, après avoir identifié son style d'acheteuse, glisser dans son porte-monnaie une des cartes de répit offertes par le psychologue Claude Boutin dans le livre J'achète (trop) et j'aime ça!. Dès qu'elle est saisie d'une envie d'acheter, elle met la main sur sa carte de répit et s'accorde un temps de réflexion avant de compléter ou non la transaction. «Une dépense retardée est une dépense évitée», dit le dicton.
5. L'inaccessible amourOn rencontre des candidats intéressants ou on vit avec l'élu, et voilà que surgissent les images de cet autre amoureux, celui qu'on a quitté, il y a des années, mais qui ne ferait pas ceci ou ne dirait pas cela et avec qui on serait sans doute bien mieux... Aline a laissé Joël il y a cinq ans, convaincue qu'elle ne pouvait plus rien attendre de cette relation qui ne la satisfaisait pas. Elle reste pourtant hantée par le souvenir de cet amour qu'elle regrette parfois et qui jette de l'ombre sur toute nouvelle relation. «Je voudrais m'en sortir définitivement», dit-elle.
«Elle a peut-être peur de plonger et préfère idéaliser», avance Louise Descôteaux. Sheryl Gaudet, elle, invite Aline à se défaire des «j'aurais dû» qui ne mènent nulle part, en lui rappelant que, si elle a quitté Joël à l'époque, c'est qu'elle était rendue là. Et c'est peut-être aussi parce qu'il n'était pas si parfait que cela. Pour s'en souvenir, Aline pourrait dresser sans tricher la liste des aspects négatifs de sa relation avec Joël, y ajoutant même, sans l'exagérer, la liste des bons côtés qui viennent la hanter, avant de tout brûler pour s'en libérer.
6. Ce style qui me colle à la peau
Envie de bouger, de prendre son envol... Mireille se sent à l'étroit dans sa peau. À l'aube de la quarantaine, elle rêve de métamorphose. Elle veut changer de style, couper ses longs cheveux, quitter ses jeans, ses souliers de course et ses vieux t-shirts pour correspondre à l'image de ce qu'elle est devenue: une professionnelle qui travaille dans un bureau BCBG du centre-ville. Elle se retient pourtant, se justifiant en disant que ses enfants et son chum ne veulent surtout pas qu'elle change.
C'est peut-être elle qui a peur du changement, qui a du mal à assumer qu'elle n'est plus l'ado qu'elle a longtemps été. Pour se défaire de cette traînerie, Mireille n'a d'autre choix que de se lancer. Elle est au bout du tremplin depuis assez longtemps, elle doit plonger, prendre tout de suite rendez-vous chez le coiffeur. Elle hésite? «Essayer, ou même louer, des perruques peut l'aider à choisir sa nouvelle tête», dit Louise Descôteaux. Il est aussi temps qu'elle prépare un sac de vêtements à donner et fasse place à la nouveauté. Impossible de tout balancer? Elle peut procéder par étapes et se défaire de ces vêtements un à un à mesure qu'elle en intègre de nouveaux. Les enfants finiront bien par s'habituer, et son conjoint sera peut-être charmé!
7. Les rancunes tenaces
Elles ont la vie dure. Et pourtant, elles ne génèrent que colère, tristesse, frustration et ressentiment. Rien de positif. Christine en veut à son amie d'enfance, qu'elle a toujours écoutée, encouragée, conseillée, épaulée... Elle est encore enragée quand elle pense qu'elle est un jour partie sans l'aviser et sans laisser d'adresse. «À l'époque, elle pensait retourner vivre chez son père, avec qui elle avait de sérieux conflits. Je lui ai dit que ce n'était peut-être pas une bonne idée, et je n'ai plus jamais eu de ses nouvelles.» C'était il y a cinq ans, et Christine en rêve encore la nuit. «Je me réveille en colère», avoue-t-elle.
«Même quand on a raison, même quand c'est vrai que les autres auraient pu agir autrement, le fait de rebâcher ça ne génère que de la colère, de la frustration, du ressentiment», note Sheryl Gaudet. Alors, on fait notre deuil de la relation, on liquide ou on oublie. Si c'est trop dur, on peut se vider le coeur dans une lettre à notre amie, «une lettre qu'on s'envoie d'abord à soi-même, après avoir précisé nos intentions et s'être demandé pourquoi on a besoin de faire ça», explique Sheryl Gaudet. Quand on reçoit la lettre, on la lit. On éprouve encore le besoin d'exprimer notre hargne à notre amie? Si c'est possible, on la lui envoie, «mais sans rien attendre de sa part», précise la thérapeute. C'est un geste qu'on pose pour soi, pour se libérer.
8. Adieu la nostalgie
Même quand tout va bien, Véronique ne peut s'empêcher de penser que c'était mieux avant, quand elle était enfant, quand elle était mariée, dans l'ancien appartement... Mais était-ce vraiment mieux avant? «Je voudrais jouir du présent!» s'exclame-t-elle.
«Certains ne reconnaissent les bonnes choses que lorsqu'elles sont passées, constate Sheryl Gaudet. Sur le coup, ça ne leur paraissait pas si bien que ça: ça devient beau à travers le filtre de l'idéalisation.» Chaque fois qu'elle se met à soupirer et à comparer, Véronique peut s'arrêter et se demander de quoi, dans les choses qu'elle vit là, maintenant, elle s'ennuiera dans deux ou cinq ans. Cela l'aidera à identifier les bons côtés de sa vie présente et d'en profiter davantage.
9. La peur qui fige et paralyse
Peur du changement, de l'échec, de la réussite, de l'opinion des autres, d'aimer, d'avoir peur... «Si je mourais demain, je n'aurais qu'un seul regret, celui d'avoir eu peur: peur de vivre pleinement, d'oser, de me lancer, reconnaît Louise. C'est donc la peur que je veux balayer.»
Pour balayer ses peurs, il faut les confronter, explique le psychologue Lucien Auger dans Vaincre ses peurs. On le fait une peur à la fois, et à petits pas. D'abord, avant de refuser une invitation tentante mais qui nous effraie, on doit apprendre à se demander de quoi on a peur au juste. Par exemple, si on nous offre de faire un petit discours à la fête d'une amie et que l'idée de parler en public nous terrifie, craint-on de bafouiller, de se ridiculiser? On essaie ensuite d'imaginer le pire: que se passerait-il vraiment si on trébuchait sur un mot? Est-ce qu'on en mourrait? Est-ce que la fête serait irrémédiablement gâchée? Puis, on dédramatise: ce n'est qu'une petite fête, l'avenir de l'humanité n'est pas en jeu, et il s'agit de dire quelques mots gentils pour une amie, pas de faire un discours complexe d'une heure. Enfin, on se prépare bien (on peaufine notre discours, on se fait des notes) et on fonce! Plus on osera, et plus il sera facile de le faire et de passer à des gestes plus difficiles à poser.