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Chacun chez soi!

Chacun chez soi!

� iStockphoto.com Photographe : � iStockphoto.com Auteur : Coup de Pouce

L'indépendance financière des femmes, la baisse du taux de natalité et une société prônant l'individualisme pourraient rimer avec cette nouvelle façon de vivre le couple, qui demeure toutefois marginale.

Trois catégories de couples

Le psychologue François St Père, spécialiste de la thérapie de couple et médiateur familial, distingue trois catégories de couples qui choisissent cette avenue. D'abord, les personnes séparées qui tentent de former une famille recomposée avec leur nouveau conjoint. «Lorsqu'elles réalisent à quel point ça peut être difficile, certaines personnes vont décider de poursuivre la relation, mais sans habiter ensemble avec tous les enfants», observe le psychologue.

La deuxième catégorie comprend les gens qui ont déjà vécu ensemble par le passé et qui se sont laissés ou ont pris une pause. «Ils veulent reprendre, mais sont craintifs de répéter les erreurs du passé», note-t-il. «Enfin, il y a la catégorie de gens qui ont un grand besoin de liberté, sont à l'aise financièrement, plus carriéristes, et qui n'ont pas le goût de fonder une famille».

Micheline Dubé, psychologue et médiatrice au Centre professionnel du Plateau Mont-Royal, voit des clients qui ont fait le choix de: «un couple, chacun son duplex ou son condo», et ce, depuis les années 1990. «C'est certain qu'il faut être à l'aise financièrement pour choisir de vivre séparément mais, personnellement, je crois que cette possibilité peut permettre, par exemple, de contourner certaines difficultés reliées à la famille recomposée - différences dans l'éducation, les enfants qui perdent leur statut dans la nouvelle cellule fusionnée, etc.», explique la psychologue.

Chacun son espace

Micheline Dubé constate que le besoin d'avoir son espace à soi est aussi présent chez les couples qui cohabitent. «Vous remarquerez que les couples qui vivent ensemble ont souvent chacun leur territoire dans la maison, selon leur profession ou leurs besoins personnels. Par exemple, monsieur a le garage, un bureau ou le sous-sol et madame a la cuisine ou un bureau, note la psychologue, en souriant. C'est tout à fait normal. Chacun a besoin de sentir qu'il a son espace de vie intime

Maintenir la flamme

Certains couples auraient-ils trouvé la solution idéale en choisissant de ne pas vivre sous le même toit? «C'est sûr que ça peut avoir des avantages. Certains partenaires, par exemple, ont des habitudes de vie très différentes. Au lieu de se confronter au quotidien, ils préfèrent avoir chacun leur appartement. Sinon, ce serait la séparation», prétend François St Père. «D'autres couples trouvent que c'est plus facile de maintenir la flamme quand ils ne se voient pas tous les jours. Personnellement, je crois que c'est possible de le faire au quotidien».

Micheline Dubé note pour sa part que «lorsqu'ils ne vivent pas sous le même toit, plusieurs couples constatent moins de laisser-aller; les conjoints donnant davantage leur meilleur quand ils se retrouvent ensemble».

Question d'argent
La psychologue admet toutefois qu'une relation du type «un couple, deux apparts» ne comporte pas que des avantages. «Quand tu rentres à la maison, le soir, tu es tout seul. Si tu as eu une dure journée au travail, personne n'est là pour te faire un petit souper et t'écouter. Les rendez-vous avec l'autre, il faut les planifier.» François St Père abonde dans le même sens: «Souvent, un des deux partenaires souhaite voir l'autre plus souvent. L'idée de vivre séparément est parfois le désir de l'un, mais pas nécessairement des deux. Et puis, il ne faut pas oublier que ça coûte cher de payer deux appartements, deux épiceries, deux factures d'électricité, etc.».
Et si ça cachait quelque chose...

Les deux psychologues s'entendent pour dire que, dans certains cas, la décision de vivre séparément peut cacher autre chose. «Je pense que bien de gens ont peur de s'ennuyer s'ils restent toujours avec la même personne. On vit plus longtemps qu'avant et l'idée de vivre sous le même toit que quelqu'un d'autre pendant 50 ou même 70 ans peut faire peur», observe Micheline Dubé. «Souvent, dans une relation, on voudrait juste se voir beaux ou sous notre meilleur jour. Ce n'est pas réaliste. C'est sûr que ça entretient le désir, mais il ne faut pas oublier qu'on vieillit tous

François St Père, lui, croit que le fait de ne pas vouloir cohabiter avec son conjoint peut cacher une peur d'être laissé. «Certaines personnes ont dû recommencer leur vie à zéro après une rupture et elles ont peur de tout perdre à nouveau. Pour elles, ça devient une façon de se protéger que de garder chacun leur chez-soi. Quand on n'habite pas ensemble, l'amour peut être aussi fort, mais c'est sûr que l'engagement est moins grand, en ce sens qu'on ne partage pas, par exemple, de responsabilités familiales ou financières», fait-il remarquer.

Mots clés: confiance et honnêteté

Une chose est certaine, selon la psychologue Micheline Dubé, c'est qu'une relation de ce type exige une grande maturité affective. «Quand on n'habite pas avec son conjoint, il faut avoir une grande confiance en soi et en l'autre, encore plus que si on vit ensemble. Le fait de ne pas avoir l'autre à l'oeil et de ne pas le voir tous les jours peut créer un grand sentiment d'insécurité. C'est essentiel d'avoir une communication franche et honnête et d'être capable de laisser l'autre exister, tout en partageant des bouts de vie».

François St Père ajoute qu'il est important, pour le couple, de bien définir les balises de la relation, par exemple sur la question de la fidélité. «Je suggère aussi à ces couples de discuter du partage des dépenses pour les activités et les voyages communs. Enfin, il ne faut pas hésiter à parler de l'engagement des partenaires. On vit séparément, mais il se passera quoi, par exemple, si l'un des deux est malade et a besoin de soutien? Même dans une relation où l'on vit sous différents toits, on veut sentir qu'on est important pour l'autre», conclut le psychologue.

Le saviez-vous?
Environ 5% des couples québécois choisissent, à long terme, de ne pas vivre sous le même toit.

Suggestions

La Force du désir, de Willy Pasini

Les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus, de John Gray
La famille recomposée: une famille composée sur un air différent, par Marie-Christine Saint-Jacques et Claudine Parent, Éditions du CHU Sainte-Justine

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