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Le vol d'identité: quoi faire pour l'éviter

Le vol d'identité: quoi faire pour l'éviter

  Photographe : Shutterstock

Les cas de vol d’identité et de fraude d’identité ont explosé depuis quelques mois. Les conséquences financières et émotives peuvent être très lourdes.

Petit guide pour prévenir les pots cassés ou les réparer, le cas échéant.

 

Benoît est loin d’oublier son 41e anniversaire. Au lendemain de ses célébrations, il a reçu un appel d’une agence de recouvrement l’informant qu’il devait une somme d’argent à une banque reconnue. N’ayant jamais fait affaire avec cette institution financière, ce résident de l’est de Montréal qui travaille dans le domaine de la restauration a compris qu’il avait été victime d’un vol d’identité.

«J’ai tout de suite été pris de panique, se souvient-il, l’air encore incrédule. Je me demandais qui était derrière le coup. Avais-je cliqué sur un hyperlien frauduleux dans un courriel? Ou était-ce plutôt la faute de mon institution financière?»

Le vol d’identité est reconnu comme un acte criminel, selon l’article 402.2 du Code criminel du Canada. Aux dires de Me Maxime Alepin, associé chez Alepin Gauthier Avocats, il se produit lorsque des contrevenants obtiennent, sans notre consentement et à notre insu, nos renseignements identificateurs (nom, adresse, date de naissance, numéro d’assurance sociale, etc.). Il conduit souvent à un autre crime: la fraude d’identité, qui consiste à utiliser notre identité afin d’obtenir un avantage ou un bien. Les fraudeurs peuvent, par exemple, toucher des prestations gouvernementales en notre nom, accéder à nos comptes bancaires et même vendre notre maison ou obtenir une nouvelle hypothèque sur celle-ci avant de disparaître avec l’argent.

Pour collecter ou soutirer nos données personnelles, les fraudeurs peuvent notamment recourir aux espiogiciels, à l’intrusion dans des bases de données, à des appels mensongers ainsi qu’à l’hameçonnage par courriel ou texto. «Ils raffinent sans cesse leurs subterfuges et s’adaptent aux circonstances [comme le télétravail en pleine pandémie] ou aux mois de l’année. En décembre, par exemple, nous sommes très occupés et donc moins vigilants», précise Valérie Parente, conseillère dans les équipes de gouvernance et fraude chez Desjardins.

Au cours de la dernière année, le Centre antifraude du Canada (CAC) a rapporté plus de 10 000 vols d’identité et environ 27 000 fraudes d’identité. Des plaignants disent aussi avoir reçu de faux textos de vaccination contre la covid-19 ou des courriels du gouvernement du Canada les invitant à cliquer sur des liens qui rendaient leurs appareils vulnérables au vol de données ou de renseignements personnels.
«Vu la hausse des cas, la question n’est plus de se demander si ça va nous arriver, mais bien quand ça va nous arriver», constate Benoît, une pointe de colère dans la voix.

 

Vol d'identité

© Stocksy

 

Freiner l’hémorragie

Si nous sommes la proie des criminels, il importe d’agir rapidement et avec sérieux, comme le rapporte Me Jean-François Latreille, CD, avocat et associé principal chez Dubé Latreille Avocats inc.: «Toute personne qui subit un préjudice doit faire un minimum de démarches pour minimiser son risque. Si elle ne fait rien et que le risque s’aggrave, elle peut être tenue responsable.»

Le premier réflexe est de rapporter l’incident à la police de la manière la plus fidèle qui soit et avec le maximum de preuves possible. «La plainte est importante, puisqu’elle donne un numéro d’événement, lequel permet de lier un argumentaire à un incident réel», explique le sergent-détective Roch Boucher de la Section des crimes économiques du Service de police de la Ville de Montréal.

Pour notre sécurité collective, nous pouvons aussi entamer le même processus du côté du Centre antifraude du Canada. «L’information fournie peut parfois aider à faire avancer ou à mener à bien une enquête, indique Sue Labine, superviseure du centre d’appel du CAC. Plus encore, les signalements font état des tendances de la criminalité et permettent d’effectuer un tableau des prévisions.»

Il convient ensuite de communiquer avec les deux agences nationales d’évaluation du crédit, Equifax et TransUnion, afin de faire inscrire un avis de fraude à nos dossiers.

Cet avis oblige tout créditeur à vérifier avec nous si nous sommes bel et bien à l’origine d’une nouvelle demande de crédit avant d’aller plus loin dans le processus.

«Par mesure préventive, admet Benoît, j’ai aussi contacté mon institution financière, les agences gouvernementales et mon fournisseur de services Internet et mobiles, afin qu’ils émettent une note d’avertissement à tous mes comptes. En ligne, j’ai aussi renforcé la sécurité de mes mots de passe et j’ai opté pour l’authentification à deux facteurs. C’était long, mais nécessaire pour avoir l’esprit tranquille.»

 

Subir les contrecoups

Le vol d’identité ne fait pas que nous gruger temps et énergie, il nous empoisonne la vie au quotidien. Sur le plan financier, nous pouvons nous voir temporairement refuser une demande de prêt, car les demandes de crédit frauduleuses affectent notre cote. «Si nous sommes en train de faire un renouvellement hypothécaire, nous devons généralement fournir plus d’explications sur nos antécédents erronés et négatifs, ce qui peut alourdir le processus», explique Valérie Parente. Sur le plan humain, nous pouvons ressentir une grande détresse psychologique à l’idée d’une récidive.

Et avec raison: «Souvent, les fraudeurs veulent exploiter au maximum les données personnelles sous diverses formes, explique Roch Boucher. Certains les revendent sur le dark Web, car chaque profil a une valeur marchande selon l’âge, le niveau d’endettement, le revenu annuel et la cote de crédit de la victime.» Benoît se souvient avoir fait une crise de panique au milieu de la nuit: il s’imaginait qu’un fraudeur volait tout l’argent qu’il avait économisé en vue de concrétiser son projet de resto-bar.

 

Demander de l’aide

Heureusement, nous ne sommes pas seuls dans cette grande lutte. Les avocats de notre institution financière ou ceux d’une firme indépendante peuvent nous aider à restaurer notre identité, à corriger les informations erronées à notre dossier de crédit, à faire annuler des transactions non autorisées, etc. «Les institutions concernées vont mener des enquêtes sur les transactions frauduleuses, précise Me Jean-François Latreille. Normalement, dès que nous sommes en mesure de prouver l’existence d’une fraude, la créance sera tout simplement annulée.»

Par ailleurs, certains assureurs offrent une garantie Frais de recouvrement en cas de fraude dans leur assurance habitation, laquelle couvre notamment les frais juridiques, les frais de déclaration notariée et la perte de revenus découlant d’une absence du travail.

 

Vol d'identité

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Découvrir les fraudeurs

En parallèle à ces démarches de longue haleine, nous pouvons tenter de mettre la main sur le criminel pour nous faire justice. «En matière de fraude, c’est du crime organisé. Je ne parle pas des Hells Angels ni de la mafia, mais plutôt des individus qui se regroupent pour commettre des infractions, remarque Roch Boucher. Parfois, nous arrivons à identifier la personne qui commet la fraude, mais pas forcément le réseau derrière.»

Advenant le cas, nous pouvons poursuivre l’auteur du méfait au civil. «Auprès du tribunal compétent, un avocat peut nous aider à réclamer, en notre nom, un montant pour indemniser les pertes monétaires et les inconvénients que nous avons subis», précise Me Maxime Alepin.

Au criminel, nous devons nous en remettre au procureur du Directeur des poursuites criminelles et pénales, qui sera chargé du procès intenté contre la personne visée. «C’est du cas par cas en fonction des circonstances, poursuit Me Maxime Alepin, mais il y aura certainement des amendes ou même des possibilités d’emprisonnement pour les fautifs.»

Bien que Benoît ne connaisse toujours pas l’identité du fraudeur, il a développé des réflexes pour se protéger d’une nouvelle attaque: «Je vérifie ma cote de crédit et mes relevés bancaires tous les dimanches soir pour m’assurer qu’il n’y a pas d’anomalies. J’explique aussi mes démarches à mes proches, afin qu’ils soient, eux aussi, doublement vigilants. Il vaut mieux prévenir que guérir», confesse-t-il, en repensant à toutes les démarches qu’il a dû entreprendre avec un avocat pour faire annuler la créance et restaurer son identité. 

 

La vigilance s’impose

En matière de vol d’identité, le risque zéro n’existe pas. Voici trois conseils pour se protéger des cybercriminels.

1. UTILISONS UN MOT DE PASSE ROBUSTE pour sécuriser notre réseau wifi. Si un hackeur réussit à le pirater, il aura accès à tous nos appareils qui y sont connectés, y compris à notre historique de navigation et à nos fichiers.

2. LIMITONS AU MAXIMUM LES RENSEIGNEMENTS QUE NOUS PUBLIONS sur les réseaux sociaux: voyages, profession, date de naissance, etc. «Certains fraudeurs utilisent ces plateformes pour étudier notre profil psychologique ou pour aller chercher de l’information complémentaire sur nous», explique Valérie Parente, conseillère dans les équipes de gouvernance et fraude chez Desjardins.

3. RETIRONS LES GÉOMARQUES D’UNE IMAGE que nous avons prise à l’aide de notre téléphone intelligent et publiée sur les réseaux sociaux. Si le fraudeur est lié à nous par un quelconque compte, il pourrait connaître notre lieu de résidence ou de travail. 

 

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