Santé
Une nouvelle approche pour soulager la douleur chronique
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La douleur chronique est une maladie très difficile à traiter. Les médicaments à eux seuls sont rarement suffisants pour lutter contre elle.
Heureusement, la recherche scientifique vient de montrer que les responsables de la douleur persistante sont des courts-circuits neuronaux dans le cerveau.
Cette découverte ouvre la voie à des traitements axés sur la relation corps-esprit, qui étonnent par leur efficacité. Ils mènent souvent à un soulagement réel et à une reprise des activités plaisantes du quotidien.
Les statistiques sont alarmantes. Près de 25 % des Canadiens sont aux prises avec une forme de douleur chronique. Celle-ci se définit comme une douleur ressentie la plupart du temps au cours des six derniers mois.
Les affections les plus communes menant à la douleur chronique sont les migraines, les troubles gastro-intestinaux, la sciatique, ainsi que les maux au dos, aux genoux et aux coudes. Environ 1 Canadien sur 10 souffre d’une forme d’arthrose. La fibromyalgie est une douleur chronique pouvant atteindre une intensité invalidante. Elle affecte 900 000 personnes au pays, dont 80 % sont des femmes.
Les coûts en soins de santé et en perte de productivité liés à la douleur chronique surpassent ceux du cancer, des maladies cardiaques et du diabète réunis.
À la recherche de la combinaison gagnante
Les professionnels de la santé ont peu d’options pour tenter de soigner une personne ayant des douleurs chroniques. Les plus communes sont la médication (analgésiques, opioïdes), les infiltrations de médicaments dans l’articulation et l’opération.
S’ajoutent à ces méthodes classiques des approches plus douces, comme l’ergothérapie, l’acupuncture, la physiothérapie et la psychothérapie. Les médecins spécialistes de la douleur chronique tentent habituellement une combinaison de multiples méthodes pour réduire l’inconfort le plus possible. Trop souvent, des personnes atteintes de douleur chronique se font dire qu’aucun remède ne peut véritablement les soigner...
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L’approche corps-esprit
Le livre The Way Out (La voie de sortie) d’Alan Gordon, psychothérapeute et directeur du Pain Psychology Center, à Los Angeles, a fait bien des vagues depuis sa publication, en août 2021. Il décrit une technique qui apprend aux patients à réinterpréter la douleur comme étant «une sensation neutre provenant du cerveau».
Selon une étude récente publiée dans JAMA Psychiatry, cette méthode visant à «recâbler» les circuits neuronaux du cerveau a réduit ou éliminé la douleur chronique chez 98 % des sujets de l’étude souffrant de douleur chronique et ayant suivi huit séances de retraitement de la douleur.
Fait important, ces résultats n’avaient toujours pas changé un an plus tard. Cet exemple encourageant, parmi bien d’autres, prouve qu’une thérapie combinant la psychologie, la neuroscience et la pleine conscience mérite tout à fait sa place dans l’arsenal scientifique contre la douleur chronique.
La douce lumière de la pleine conscience
Au Québec, des patients aux prises avec la douleur chronique ont accès au programme Gestion de la douleur chronique basée sur la pleine conscience, offert à la Clinique de la douleur du CHUM depuis une vingtaine d’années.
C’est le Dr Allen Steverman, un médecin de famille dont la pratique se concentre sur la douleur chronique, qui pilote des groupes de 12 à 14 patients pendant 12 semaines. Son approche est multiple: «Les cas de douleur chronique sont souvent complexes. Je vois les patients en consultation individuelle pendant laquelle je procède à une évaluation et à un diagnostic avant d’établir un plan de traitement.» Il se peut alors que le Dr Steverman propose au patient de suivre le programme sur la pleine conscience mis au point au Canada par la Dre Jackie Gardner-Nix. «Le but n’est pas de remplacer les autres interventions par la méditation basée sur la pleine conscience, mais plutôt que cette méthode se joigne à un ensemble de possibilités. Nous avons remarqué que les autres traitements sont généralement plus efficaces chez les patientes et les patients qui la pratiquent», souligne-t-il.
Une méthode qui a fait ses preuves
Le Dr Steverman nous explique que la pleine conscience consiste à diriger délibérément son attention sur le moment présent, sans porter de jugement sur l’expérience vécue. L’objectif est de changer la manière dont l’expérience de la douleur chronique est vécue en tentant de séparer la sensation physique de la douleur des pensées et des émotions. Ce sont ces dernières qui, souvent, accentuent la souffrance liée à la douleur. Avec le temps, cet entraînement mène à une diminution de l’intensité de la douleur ressentie. L’approche de pleine conscience a amplement fait les preuves de son efficacité, au point où le Collège des médecins de famille du Canada la recommande parmi les traitements de la douleur chronique.
Se débarrasser des boulets
En étant moins dérangée au quotidien par la souffrance, la personne qui pratique la pleine conscience peut reprendre certaines de ses activités et ainsi augmenter sa qualité de vie. «De nombreux patients nous ont indiqué être très heureux d’avoir participé à ce programme et auraient même voulu le connaître plus tôt. Les bienfaits dépendent de chacun. Ce n’est pas une panacée», souligne le Dr Steverman.
Une de ses patientes, Carole Josée, une ancienne gestionnaire de 56 ans déclarée invalide au travail à cause de sa fibromyalgie et de son arthrose généralisée, a suivi deux volets du programme de gestion de la douleur chronique basée sur la pleine conscience au CHUM. Après une trentaine d’années de douleur, elle a enfin découvert un outil important. «La méditation m’a vraiment aidée à aller à l’intérieur de moi-même pour devenir maître de mon présent et rester lucide en face de la vie, témoigne-t-elle. Mon anxiété a diminué, et je me suis débarrassée du boulet du jugement. Cette pratique est devenue aussi nécessaire que l’activité physique. Pendant mes longues marches ou quand je nage, je ne pense pas à mes bobos...»
L’utilité et... L’INUTILITÉ DE LA DOULEUR
La douleur consiste en des signaux électriques et chimiques que différentes régions du corps envoient au cerveau pour l’avertir d’un danger. Lorsque la douleur est aiguë, le traitement est axé sur la lésion, la maladie ou la blessure qui en est responsable. Or quand la douleur aiguë devient chronique, des changements s’installent dans le système nerveux central et le cerveau. L’approche corps-esprit se base sur la capacité du cerveau à former de nouvelles connexions, afin que la douleur soit moins stimulée par des pensées et des émotions.
Pour aller plus loin
On visite le gerermadouleur.ca. Ce site contient des outils mis au point par des cliniciens chercheurs pour aider les personnes aux prises avec la douleur chronique. Elles y découvriront des ressources d’autogestion pour soutenir leur traitement.
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