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Sommes-nous trop médicamentés?

Sommes-nous trop médicamentés?

  Photographe : Shutterstock

Dénonciation de la surmédication en santé mentale, trop de ritalin pour les enfants, polymédication chez les aînées, crise des opioïdes, résistance aux antibiotiques… Des spécialistes sonnent l’alarme partout dans le monde. Sommes-nous tous trop médicamentés?

 

Les médicaments guérissent et préviennent les maladies. Cependant, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que plus de la moitié des médicaments sont prescrits, distribués ou vendus de façon inappropriée. L’usage d’un trop grand nombre de médicaments (polypharmacie) chez les personnes âgées ou ayant un problème de santé complexe en est un exemple. Caroline Laflamme, pharmacienne communautaire et chargée de cours à l'Université de Montréal, explique que cela peut entraîner «une cascade médicamenteuse», ce qui arrive lorsqu’on traite les effets indésirables d’un médicament par un autre médicament. Au Canada, près d’une personne de 65 ans et plus sur quatre consomme plus de 10 médicaments sous ordonnance différents chaque jour. Chutes, fractures, problèmes de mémoire, hospitalisations fréquentes et décès sont quelques-unes des conséquences graves de la polypharmacie.

Lorsqu’un médicament ne nous est plus bénéfique ou devient carrément nocif, notre médecin et notre pharmacien nous guident vers sa diminution ou son arrêt. Ce processus rigoureux de déprescription vise la réduction de la polypharmacie. Cela concerne surtout les opioïdes (ex.: morphine) prescrits dans le cas de douleur chronique, car une prise régulière crée une tolérance, qui peut mener, à son tour, à une intoxication et à une dépendance. Au Québec, entre 2010 et 2014, le nombre annuel moyen de décès par une intoxication par opioïdes a augmenté de 27 % comparativement à la période de 2005 à 2009. Et c’est chez les 35 à 64 ans qu’on enregistre le plus d’intoxications et de décès liés aux opioïdes.

Un projet panquébécois en CHSLD a comme objectif la réduction des antipsychotiques chez les personnes ayant des symptômes de démence. On souhaite promouvoir des interventions non pharmacologiques et plus humaines, telles que l’écoute active ou la zoothérapie pour diminuer l’anxiété de ces personnes, explique la pharmacienne. Pour elle, le dialogue entre le professionnel de la santé et le patient doit être au cœur des soins: «On doit conscientiser le patient à son problème de santé si l’on veut qu’il soit actif dans sa prise en charge, qu’il voie les approches thérapeutiques possibles, les risques et les bénéfices. De cette façon, il pourra prendre une décision libre et éclairée.»

 

Une ère postantibiotique?

L’usage abusif et excessif des antibiotiques a accéléré la résistance de certaines bactéries, ce qui inquiète l’OMS. Selon elle, si nous ne prenons pas des mesures d’urgence, nous entrerons bientôt dans une ère postantibiotique dans laquelle des infections courantes et de petites blessures seront à nouveau mortelles. Pour le Dr Jeannot Dumaresq, spécialiste en microbiologie médicale et infectiologue, «les antibiotiques ne sont pas des bonbons, il faut peser le pour et le contre avant de les prescrire». De nombreuses maladies sont virales. Dans ces cas, les antibiotiques ne changent rien à la guérison, ils risquent même de causer des effets secondaires, soutient le Dr Dumaresq. Des études montrent que 7 personnes sur 10 guériront mieux sans traitement en cas de rhume, de bronchite aiguë et de sinusites, du moins pour la plupart d’entre elles. Si l’on n’est pas gravement malade, notre professionnel de la santé pourra discuter avec nous des choix de traitement possibles. Nous devons communiquer avec nos professionnels de la santé, afin de mieux comprendre notre maladie et la manière dont nous pouvons nous soigner nous-mêmes.

 

Les approches complémentaires

La santé intégrative est une approche axée sur la santé optimale et le mieux-être. Il s’agit d’une combinaison de thérapies conventionnelles et de modes de traitement complémentaires, explique Chantal Levesque, responsable de programmes à l’Université de Montréal. Ces modes de traitement complémentaires (ex.: massothérapie, alimentation anti-inflammatoire) sont généralement sécuritaires et se combinent à la médication. Dans le cas de douleurs aiguës ou chroniques, nous pouvons pratiquer des exercices adaptés, faire de la méditation et visiter notre acupuncteur pour soulager nos maux. Si l’on souffre de diabète de type 2, adopter une alimentation saine et faire de l’activité physique peuvent améliorer notre condition et même, dans certains cas, renverser le diagnostic. «Dans une population vieillissante, ces approches deviennent une nécessité, car la solution ne peut plus être que pharmaceutique», conclut la pharmacienne Caroline Laflamme.

 

COMMENT PRÉVENIR ET COMBATTRE LA RÉSISTANCE AUX ANTIBIOTIQUES?

  • Utilisez des médicaments prescrits par un professionnel de santé qualifié.
  • N’exigez pas d’antibiotiques si ce professionnel ne le juge pas nécessaire.
  • Respectez les conseils de votre soignant.
  • Ne partagez pas vos antibiotiques et autres médicaments.
  • Adoptez des habitudes préventives: lavez-vous les mains, évitez d’être en contact avec des malades, protégez vos rapports sexuels et tenez vos vaccinations à jour.
  • Préparez vos aliments de façon hygiénique (ex.: bonne cuisson et température de conservation adéquate) et mangez des viandes sans antibiotiques.
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