Santé
Mon cerveau est-il en forme?
Notre cerveau nous permet de parler, marcher, écrire, réfléchir... Voici ce qu’il faut savoir pour mieux le garder en forme.
1. Le cerveau est le quartier général du corps
On a longtemps cru que c'était le coeur qui contrôlait l'activité physique et mentale de l'être humain. Ainsi, pour le philosophe grec Aristote, le cerveau était un simple radiateur qui filtrait et refroidissait le sang. On sait aujourd'hui que le cerveau contrôle nos gestes, nos paroles, nos pensées, notre mémoire et bien d'autres fonctions biologiques, comme la respiration et le rythme cardiaque. Cet organe complexe, qui forme avec la moelle épinière le système nerveux central, reçoit des informations du corps et transmet à son tour des messages, notamment aux muscles. Le cerveau agit donc comme un centre d'opérations où plusieurs machines opèrent: le cervelet, le tronc cérébral et les deux hémisphères (gauche et droit). Ces derniers, reliés par un faisceau de fibres nerveuses appelé le corps calleux, sont divisés en quatre lobes:
• le lobe frontal, responsable des fonctions motrices, de la planification, du raisonnement et de la modulation des émotions;
• le lobe pariétal, responsable des activités sensorielles (goûter, toucher, température et douleur) et du langage;
• le lobe temporal, responsable de l'ouïe et de la mémoire;
• le lobe occipital, responsable de la vision.
2. Le cerveau possède autant de neurones que notre galaxie compte d'étoiles
Il en renferme 100 milliards! Pour atteindre ce nombre à la naissance, le foetus en fabrique jusqu'à 250 000 par minute. Essentiels au fonctionnement du corps, les neurones reçoivent et transmettent des informations, sous forme de signaux électriques ou chimiques, grâce à des jonctions appelées synapses. «Un seul neurone peut être en contact avec 10 000 synapses», précise André Parent, professeur de neurosciences à l'Université Laval et auteur du livre Histoire du cerveau. De l'Antiquité aux neurosciences. Les neurones, qui se nourrissent d'oxygène et de nutriments, ne peuvent se multiplier ni être réparés lorsqu'ils sont endommagés.
3. L'enfance est l'âge d'or du cerveau
Avant l'âge de 5 ans, le cerveau se développe à une vitesse fulgurante, multipliant les synapses qui permettent de faire circuler l'information. «À l'âge de 2 ans, leur nombre est de quatre à cinq fois plus élevé qu'à l'âge adulte», explique Maryse Lassonde, neuropsychologue et professeure titulaire au département de psychologie de l'Université de Montréal. Après l'âge de 5 ans (et jusqu'à l'âge adulte), le cerveau procède à un élagage des synapses, éliminant les moins utiles et renforçant les autres. «Le cerveau se modèle selon les apprentissages, les expériences et l'environnement», dit André Parent. Il est très malléable, surtout durant l'enfance. Par exemple, les gens qui ont appris tôt dans la vie à jouer d'un instrument de musique possèdent un corps calleux plus gros que la moyenne, selon Maryse Lassonde, car ils y ont développé, à force de pratiquer leur coordination et leur dextérité, des fibres nerveuses supplémentaires.
4. Le cerveau décline dès l'âge de 20 ans
C'est à ce moment qu'on commence à perdre des neurones. Mais cela n'a rien d'alarmant, le cerveau en possède une galaxie. En vieillissant, les neurones changent aussi de morphologie. À partir de 50 ans, les dendrites, ces prolongements neuronaux qui reçoivent l'information des synapses, peuvent perdre jusqu'à la moitié de leurs épines, selon André Parent. «Cela peut entraîner certains déficits cognitifs, comme la perte de mémoire», précise-t-il. La situation est particulièrement dramatique chez les gens qui souffrent de la maladie d'Alzheimer. Leurs neurones meurent en grande quantité, et les premières cellules nerveuses touchées sont celles situées dans la partie du cerveau qui contrôle la mémoire.
5. Le cerveau de l'homme est plus volumineux que celui de la femme
C'est vrai... mais cela ne signifie aucunement que l'homme soit plus intelligent qu'elle! Le cerveau d'un adulte représente environ 2 % de son poids corporel. Il pèse donc, en moyenne, 1 250 g chez la femme, contre 1 350 g chez l'homme, indique André Parent. Des exceptions existent toutefois. «Le cerveau d'Anatole France [écrivain français qui a remporté le prix Nobel de littérature en 1921] ne pesait que 1 000 g», souligne André Parent. La preuve que le génie ne tient pas au volume du cerveau.
6. Les femmes reconnaissent et expriment mieux les émotions que les hommes
C'est ce qu'a montré une étude publiée en 2009 dans la revue Neuropsychologia. Le chercheur Olivier Collignon et son équipe du Centre de recherche en neuropsychologie et cognition de l'Université de Montréal ont demandé à des femmes et des hommes d'identifier le plus rapidement possible une émotion de peur ou de dégoût sur le visage d'acteurs ou d'actrices filmés. Les femmes ont remporté la palme. Les actrices aussi! Les émotions qu'elles ont simulées ont en effet été mieux distinguées par les participants. Comment expliquer cette différence? Certains avancent que la femme serait dotée d'une disposition biologique lui permettant de décoder les émotions; en tant que mère, elle doit percevoir les besoins et les signes de détresse de son bébé. D'autres pointent du doigt la socialisation des filles, qui apprennent rapidement à être à l'écoute des autres. Également, les femmes possèdent en général de meilleures habiletés verbales que les hommes, d'après Maryse Lassonde, tandis que la gent masculine, elle, a une meilleure conception tridimensionnelle de l'espace. Mais on ignore aussi pourquoi.
7. Le cerveau peut subir une «crise cardiaque»
L'accident vasculaire cérébral (AVC) est semblable à l'infarctus du myocarde: il survient lorsqu'un caillot de sang bloque une des six artères du cerveau. Privés d'oxygène, les neurones meurent. Les séquelles (paralysie, difficulté d'élocution, perte de mémoire, etc.) dépendent de la région cérébrale touchée. «Certaines victimes d'AVC n'ont aucun handicap apparent, souligne Lesley K. Fellows, neurologue et professeur au département de neurologie et neurochirurgie à l'université McGill, mais elles souffrent de problèmes cognitifs, comme un trouble de concentration ou d'attention, ce qui leur nuit dans leur quotidien.» L'AVC peut être traité à condition que l'on se rende à l'hôpital dans les heures suivant l'apparition de ces symptômes: faiblesse ou engourdissement au visage, à un bras ou à une jambe; difficulté d'élocution ou de compréhension, ou confusion; vue embrouillée ou cécité; mal de tête intense; ou étourdissement, perte de l'équilibre ou problèmes de coordination. On injecte alors par intraveineuse un médicament thrombolitique qui dissout le caillot sanguin.
8. Le gym, c'est aussi bon pour le cerveau
Les gens qui pratiquent une activité cardiovasculaire d'intensité modérée (vélo, jogging, etc.) pendant 40 à 50 minutes trois fois par semaine ont une meilleure concentration et une plus grande attention que les gens sédentaires, selon Dave Ellemberg, neuropsychologue et professeur au département de kinésiologie de l'Université de Montréal. Ils ont aussi des réflexes plus rapides - pour rattraper un objet qui tombe, par exemple. «Ces bienfaits perdurent au moins une heure après l'activité physique», indique Dave Ellemberg. Faire de l'exercice physique modifie la chimie du cerveau. Lorsqu'on pratique un sport, le taux de dopamine et de norépinephrine, des neurotransmetteurs qui jouent un rôle dans l'attention, augmente. L'organisme libère aussi davantage de facteurs neurotrophiques dérivés du cerveau, des protéines qui stimulent la production de synapses. «Les gens actifs ont une plus grande densité synaptique dans certaines régions du cerveau, comme les hippocampes, impliqués dans la mémoire», précise Dave Ellemberg. Leurs neurones sont aussi mieux oxygénés. Les gens actifs ont moins de chances de souffrir d'athérosclérose, une maladie qui entraîne l'accumulation de lipides sur les parois artérielles et peut provoquer l'obstruction des artères, notamment du cerveau, qui mobilise environ 20 % du sang et de l'oxygène de l'organisme. Les maladies cardiovasculaires, l'hypertension, l'hypercholestérolémie, l'obésité, le tabac et le diabète de type 2 sont des facteurs de risque de la maladie d'Alzheimer.
9. Le cerveau est meilleur au bowling qu'à la jonglerie
C'est bien plus facile de lancer une boule à la fois! Le cerveau peut réussir simultanément deux tâches si l'une d'elles est très familière. Ainsi, un automobiliste expérimenté est capable de tenir une conversation avec un passager tout en conduisant, ce qui n'est pas le cas d'un apprenti conducteur. Une étude américaine, publiée en 2001 dans la revue scientifique Neuroimage a montré que le cerveau peine à accomplir correctement deux activités complexes. Des chercheurs ont demandé à des sujets de répondre à une question orale plutôt compliquée tout en effectuant mentalement la rotation d'un objet 3D. Leur cerveau s'activait moins quand les deux activités étaient effectuées de façon simultanée plutôt que de façon consécutive. Conclusion: contrairement aux ordis, le cerveau n'est pas vraiment multitâches.
10. Les joueuses de soccer et de hockey ont plus de chances de subir une commotion cérébrale que leurs homologues masculins
Leur risque est de 2,5 à 3 fois plus élevé, selon Dave Ellemberg. «Des études suggèrent aussi que les séquelles des commotions chez les femmes seraient plus graves et dureraient plus longtemps», soutient-t-il. On ignore pourquoi. Différentes hypothèses sont envisagées: les femmes, dont les muscles du cou et des épaules sont plus faibles que ceux des hommes, pourraient moins bien absorber les chocs à la tête; le cerveau féminin serait plus fragile; et les athlètes féminines, qui commencent à pratiquer leur sport plus tard dans la vie que les garçons, sont moins expérimentées. Les gens qui ont subi des commotions cérébrales répétées, comme les anciens boxeurs ou les footballeurs, seraient plus à risque d'être atteint de la maladie d'Alzheimer.
11. On peut «muscler» son cerveau
Et pas nécessairement en jouant à des jeux de mémoire! Une panoplie d'activités permettent de stimuler le cerveau: apprendre à jouer d'un instrument de musique, lire un livre, faire des mots croisés, discuter d'un film avec des amis, etc. «L'important, c'est de rester actif physiquement, mentalement et socialement, dit Lesley K. Fellows. Les gens qui dansent plusieurs fois par semaine ont moins tendance à avoir des problèmes de démence.»
Cerveau: les découvertes marquantes
5e siècle av. J.-C.: Le savant grec Hippocrate, père de la médecine, est l'un des premiers à découvrir que le cerveau est le centre des commandes du corps.
1543. André Vésale, anatomiste et médecin flamand, publie un volumineux traité d'anatomie où il illustre le cerveau conformément à la réalité.
1848. Phineas Gage, contremaître de chemin de fer au Vermont, voit son crâne transpercé par une longue tige de métal lors d'une explosion sur son lieu de travail. Il survit, mais perd son lobe frontal. Il devient alors insouciant et vulgaire, ce qui révèle le rôle du lobe frontal.
1861. Le neurochirurgien français Paul Broca découvre le centre du langage (aujourd'hui appelé aire de Broca), situé dans le lobe frontal du cerveau.
1906. Le neurobiologiste espagnol Santiago Ramón y Cajal découvre que le neurone est l'unité de base du système nerveux. Le neurologue et psychiatre allemand Alois Alzheimer identifie les signes de la maladie qui portera plus tard son nom.
1934. Le neurochirurgien canadien Wilder Penfield fonde l'Institut neurologique de Montréal. Ce professeur de l'université McGill a cartographié l'écorce du cortex cérébral.
1955. La neuropsychologue Brenda Milner, de l'Institut neurologique de Montréal, découvre le rôle de l'hippocampe dans la mémoire.
Pour en savoir plus
- Le cerveau à tous les niveaux
- La Fondation des maladies du coeur du Québec
- La Société Alzheimer du Canada