Santé
Céphalée: quand l’analgésique donne mal à la tête
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Pour soulager un mal de tête, le premier réflexe est de prendre un analgésique. Et si ce dernier était la cause d’une céphalée médicamenteuse?
Le danger d'utiliser une médication inefficace ou partiellement efficace entraîne la surconsommation de cette médication. Analgésique simple ou composé, ou traitement de choc à base de triptan, la prise de médicament plus de trois fois par semaine pendant plus de trois mois entraînera l'apparition d'une céphalée d'origine médicamenteuse, c'est-à-dire un mal de tête causé par le médicament justement utilisé pour l'enrayer.
Selon la nature du mal de tête, le traitement sera plus ou moins efficace. La migraine ne répondra pas de façon satisfaisante à une simple analgésie alors qu'une céphalée d'origine cervicale ou un mal de tête de tension pourraient être soulagés partiellement si le traitement s'effectue assez tôt.
Un défaut de gestion de la douleur
Chez le migraineux, il est assez bien établi maintenant qu'il existe un défaut dans le système de gestion de la douleur au niveau du cerveau. Pour tout dire, le mécanisme de la migraine s'établit en deux phases: d'abord, une phase de sensibilisation périphérique, puis une phase de sensibilisation centrale.
La sensibilisation périphérique
La sensibilisation périphérique s'effectue au niveau des fibres du nerf trijumeau (5e nerf crânien) qui innervent les vaisseaux de la base du cerveau. L'activation de ces fibres entraîne l'apparition d'une inflammation au niveau de la paroi des vaisseaux irrigant les enveloppes du cerveau, particulièrement la dure-mère (enveloppe externe des méninges), surtout dans la région de la base du cerveau. Cette inflammation stérile, c'est-à-dire non infectieuse et purement inflammatoire, est causée par la libération de substances peptidiques comme la substance P et le CGRP («Calcitonin Gene Related Peptide») qui entraînent un épaississement de la paroi des vaisseaux sanguins et que l'on croit être la source de la douleur dans la migraine. En gros, cette phase dure entre 30 et 60 minutes.
La sensibilisation centrale
Par la suite, la transmission des influx douloureux provenant des vaisseaux sanguins se fait vers les centres de contrôle de la douleur du cerveau, via les neurones de second et de troisième ordre. Cette phase survient 60 minutes après l'apparition des premières douleurs. Une fois cette seconde phase enclenchée, il devient très difficile de traiter la migraine car une sensation douloureuse cutanée s'installe. Cette sensation est appelée allodynie et est causée, elle aussi, par la libération de substances peptidiques nociceptives (qui produisent de la douleur) par les terminaisons nerveuses situées dans les muscles et la peau entourant la tête. C'est justement à ce niveau que semble se situer le défaut de contrôle de la douleur du cerveau migraineux. Il perd tout simplement le contrôle des influx douloureux qui l'assaillent et la douleur devient incontrôlable, invalidante et tend à se généraliser à toute la tête.
La nécessité d'une médication appropriée
Tout cela semble bien compliqué, mais rassurez-vous... ça l'est vraiment! Pour expliquer le tout en mots simples, disons que le cerveau migraineux perd la capacité de contrôler la douleur qui est en train de s'installer au début de la crise migraineuse, d'où la nécessité de traiter cette crise dès son apparition avec une médication appropriée. Si la médication utilisée ne fonctionne pas adéquatement, le feu est pris et il n'y a pas d'eau pour l'éteindre!
Le danger d'une médication inappropriée
Une fois l'allodynie installée, la médication analgésique et même migraineuse spécifique, comme les triptans, devient inopérante ou beaucoup moins efficace. Un découplage s'est installé entre les centres de contrôle de la douleur du cerveau, où agissent les analgésiques, et les régions affectées par l'allodynie.
Une fois l'allodynie installée, l'effet thérapeutique partiel des triptans est de bloquer la libération des substances peptidiques nociceptives au niveau périphérique. Mais le mécanisme de sensibilisation centrale étant déjà enclenché, cet effet ne sera que partiel.
Le danger d'utiliser une médication inefficace ou partiellement efficace va entraîner la surconsommation de cette médication. Analgésique simple ou composé, ou traitement de choc à base de triptan, la prise de médicament plus de trois fois par semaine pendant plus de trois mois entraînera l'apparition d'une céphalée d'origine médicamenteuse, c'est-à-dire un mal de tête causé par le médicament justement utilisé pour l'enrayer...
Alors, amis migraineux, attention! Prendre plus de médicaments n'est pas toujours la meilleure solution. Il faut retenir ici que le traitement le plus efficace est celui qui est pris dès l'apparition du mal de tête.
Sources
MOSKOWITZ, M.A., «The visceral organ brain: Implications for the pathophysiology of vascular head pain.» Neurology, 1991; 41:182-186.
BURSTEIN, R., JAKUBOWSKI, M., «Unitary hypothesis for multiple triggers of the pain and strain of migraine.» J Comp Neurol. 5 déc 2005; 493 (1):9-14.