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On muscle notre cerveau!

On muscle notre cerveau!

Auteur : Coup de Pouce

Où sont mes clés? Où ai-je laissé mon sac à main? Ai-je encore oublié la casserole sur la cuisinière? Doit-on courir chez le médecin si on a des trous de mémoire?

Un muscle qui prend de l'âge
D'après le Dr Ziad Nasreddine, neurologue à l'hôpital Charles-Lemoyne et professeur d'enseignement clinique au département de médecine de l'Université de Sherbrooke, ces petits oublis font partie du vieillissement normal. En effet, comme notre peau, le cerveau n'échappe malheureusement pas aux signes de vieillissement. Dès le début de l'âge adulte, on perd des neurones. Même à l'adolescence, avance Christian Bocti, neurologue, chercheur à la clinique de la mémoire de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont et professeur adjoint de clinique à la faculté de médecine de l'Université de Montréal. «Le vieillissement est associé à une perte de volume, à une atrophie de quelques centimètres cube, du lobe frontal, mais aussi de l'hippocampe, qui est impliqué dans les nouveaux apprentissages. Vieillir est aussi intimement lié à une diminution de l'attention et à une difficulté à composer avec le multitâche. Les ados font leurs devoirs tout en naviguant sur Internet et en écoutant de la musique. Les personnes âgées ne peuvent en faire autant.»

Les différents signes de vieillissement
Autre signe de vieillissement: la vitesse à laquelle on récupère l'information diminue. «Ce qu'on voit dans le vieillissement normal, ce n'est pas tant les pertes de mémoire qu'une plus grande difficulté à retrouver l'information, explique la Dre Nathalie Shamlian, gérontopsychiatre, responsable de la clinique de la mémoire de l'hôpital du Sacré-Coeur. L'information n'est pas disparue, elle est simplement plus difficilement accessible. Pour se rappeler le nom d'un acteur connu, on aura besoin de plus de temps ou d'un indice, par exemple. Le vieillissement amène aussi un ralentissement de fonctions comme la planification, le jugement, la prise de décision, la vitesse d'exécution et la capacité de résoudre les problèmes, qui se trouvent au niveau du lobe frontal.»

Par ailleurs, avec l'âge, on devient également moins efficace pour encoder l'information, ajoute la neuropsychologue Sylvie Belleville, professeure titulaire au département de psychologie de l'Université de Montréal et chercheuse au Centre de recherche de l'Institut universitaire de gériatrie de Montréal (CRIUGM). «Les régions frontales du cerveau sont aussi impliquées dans la mise en place de stratégies. Pour retenir un numéro de téléphone, par exemple, les jeunes vont le mémoriser en faisant des liens avec des choses connues (ex.: si les quatre derniers chiffres sont 1960, ils vont penser aux années 1960), alors que les personnes âgées ont plus tendance à faire de l'autorépétition (1960-1960-1960...).» Faire des liens est la meilleure façon de faire, peu importe l'âge. Si notre mémoire faiblit avec l'âge, c'est d'ailleurs la meilleure façon de compenser.

Normal ou pas de perdre la mémoire?
On n'a pas à s'inquiéter tant que nos oublis demeurent occasionnels, selon le Dr Nasreddine. «Il faut consulter lorsqu'ils deviennent fréquents (quotidiens, par exemple) et plus importants (oublier le nom de quelqu'un qu'on connaît bien, par exemple). Ils affectent alors le comportement de la personne et exigent des mesures compensatoires (ex.: prise de notes) de sa part pour pallier les difficultés rencontrées, car éventuellement, son employeur et ses proches lui feront des remarques.» Des exemples de situations anormales: oublier des rendez-vous, une conversation récente, des informations qu'on savait jadis par coeur, faire répéter autrui ou se répéter.Jamais trop tard
Tout n'est pas perdu. «Si on commence tôt à prendre soin de notre cerveau, on met toutes les chances de notre côté pour qu'il ne vieillisse pas prématurément», fait valoir le neuropsychologue Louis Bherer, professeur au département de psychologie de l'UQAM et chercheur au CRIUGM. Ainsi, une étude américaine réalisée auprès des religieuses d'un couvent a montré qu'une activité cognitive intense avait un effet protecteur contre la maladie d'Alzheimer. Cet effet était d'autant plus marqué que la stimulation cérébrale était importante, qu'elle avait démarré tôt et s'était poursuivie tout au long de l'existence.

Cela dit, «il n'est jamais trop tard pour agir», nuance Louis Behrer. Ses travaux, qui portent notamment sur l'effet de la stimulation intellectuelle et du conditionnement physique sur la vitalité cognitive des personnes âgées, en sont un exemple éloquent. «Chez toutes les personnes âgées qui suivent un programme de remise en forme physique ou intellectuelle, on observe une amélioration des performances cognitives, se réjouit-il. Cela touche principalement la capacité d'attention (ex.: ne pas se laisser distraire par les bruits environnants) et la mémoire à court terme. Après 6 mois, si on compare leur état avant de participer au projet et celui après, on a l'impression que leur cerveau a rajeuni de 10 à 20 ans.»

Il n'y a donc pas d'âge pour faire subir une cure de rajeunissement à notre cerveau. À preuve, de plus en plus d'études mettent en évidence la remarquable capacité du cerveau, jeune comme âgé, à s'adapter et à se transformer en fonction de l'environnement, à remodeler les connexions entre ses neurones de façon à aménager des chemins privilégiés pour faire circuler des informations importantes. «Jusqu'à tout récemment, les chercheurs croyaient dur comme fer que le cerveau n'avait pas la capacité de se régénérer, expose la Dre Shamlian. Or, les données actuelles vont dans le sens contraire. Le cerveau peut se transformer et se restructurer durant toute notre vie.»Remusclez votre cerveau!
On craint que notre cerveau ne ramollisse? Pas de panique! Il existe des moyens de préserver sa vivacité d'esprit.

  • On stimule son esprit. Lecture, écriture, danse, musique, échecs, scrabble, mots croisés, mots mystère, sudoku... Faites marcher vos neurones! «L'idée est d'utiliser son cerveau le plus souvent possible en choisissant des activités stimulantes et variées, dit la Dre Shamlian. Tout au long de notre vie, il faut développer de nouveaux intérêts et apprendre de nouvelles choses. Cela vaut pour les loisirs, mais aussi au travail, où la routine a tendance à s'installer. Il faut constamment chercher à se mettre en situation d'apprentissage, en acceptant un nouveau défi au travail ou en suivant une formation en parallèle, par exemple.»

    Le neurologue Christian Bocti abonde dans le même sens. «L'activité intellectuelle entraîne la production de nouvelles connexions synaptiques dans le cerveau, explique-t-il. En faisant travailler son cerveau, on enrichit donc son réseau de neurones. Cette réserve cérébrale protège l'individu contre l'apparition précoce des signes de vieillissement. D'ailleurs, les recherches montrent que les gens qui ont étudié longtemps ou ceux qui parlent deux langues ont une réserve cérébrale supérieure.»

    Bref, à risque égal, celui ou celle qui a eu une activité cérébrale importante et la poursuit n'échappera peut-être pas aux signes de vieillissement normal, mais s'en défendra mieux. Dans le même esprit, tous s'entendent pour dire que maintenir un réseau social est aussi un facteur de protection important. Dans l'interaction avec l'autre, plusieurs régions du cerveau sont stimulées. Pour communiquer, souligne la Dre Shamlian, nous devons notamment puiser dans nos souvenirs, structurer notre pensée, parler, partager des connaissances et encoder de nouvelles informations, autant d'activités qui gardent notre cerveau alerte.

  • On bouge! On connaît les effets de l'exercice physique sur le coeur, les os et les muscles. Ce qu'on sait moins, c'est que le cerveau en bénéficie aussi. «Les personnes âgées qui pratiquent régulièrement une activité physique ont une meilleure santé cognitive, confirme Louis Bherer. Pendant l'exercice, le débit sanguin cérébral augmente, le cerveau consomme mieux l'oxygène et reçoit mieux les nutriments.» Pour en bénéficier au maximum, il conseille de privilégier les sports aérobiques comme la marche rapide, la natation, le vélo et le ski de fond. L'exercice permet aussi de réduire le risque de certaines maladies comme l'obésité, l'hypercholestérolémie et le diabète, qui augmentent les risques de démence. «L'hypertension artérielle est un facteur de risque majeur, renchérit le Dr Bocti. Une personne qui en souffre à 50 ans augmente de presque cinq fois ses risques de démence vasculaire ou d'Alzheimer à 80 ans.»

  • On se nourrit bien. Une saine alimentation protège aussi le cerveau, selon les experts. Manger du poisson, notamment, permettrait de faire le plein d'acides oméga 3, essentiels aux fonctions cognitives. Et rien de mieux qu'une diète équilibrée pour éviter les maladies.

  • Gare aux accidents! Un conseil: on protège notre coco. Subir un traumatisme crânien accroît également le risque de démence. Alors, on la boucle en voiture et on porte un casque à vélo et sur les pentes de ski.Le cerveau est un réseau complexe de neurones servant à intégrer les informations et à décider d'une réponse motrice ou d'un comportement.

    Deux types de neurones
    Il existe deux types de neurones: sensoriels et moteurs. Les neurones sensoriels transmettent les informations venant de la périphérie du système (vue, ouïe, goût, odorat, toucher) vers le cerveau, alors que les neurones moteurs acheminent l'information dans le sens inverse, pour commander les muscles. Pour ce faire, les cellules sont traversées par un courant électrique, l'influx nerveux, qui se propage le long des prolongements des neurones, comme le long d'un fil électrique, et est transmis à d'autres cellules, grâce à une jonction nommée synapse.

    Des synapses sont présentes dans les quatre hémisphères (ou lobes) du cerveau. Chacun est spécialisé dans des tâches précises. Le lobe frontal est responsable de la coordination motrice volontaire et des aires qui contrôlent la coordination musculaire et les mouvements rythmiques de la tête et du cou comme la mastication et la déglutition. Il renferme aussi les centres de la pensée, de la mémoire, du raisonnement et des associations. Le lobe occipital contient les centres responsables de la vision. Le lobe pariétal reçoit les informations relatives au toucher et à l'orientation spatiale, tandis que le lobe temporal contient les centres de l'audition, du goût et de la mémoire.

    Le saviez-vous?
  • Le cerveau adulte compte environ 100 milliards de neurones.
  • En début de grossesse, les neurones d'un foetus se multiplient au rythme de 250 000 à la minute.
  • Le cerveau compte pour 2 % du poids total du corps, mais consomme 15 % du flot sanguin et utilise 20 % de l'oxygène que nous respirons.
  • À l'état de vieille, notre cerveau génère 25 watts, assez pour illuminer une ampoule électrique.
  • L'infrastructure du cerveau se construit jusqu'à l'âge de 15 à 17 ans, mais la capacité d'apprendre se conserve jusqu'à la mort.

    Pour en savoir plus
  • Votre mémoire, bien la connaître, mieux s'en servir, sous la direction du Dr Bernard Croisile, Larousse, 2004, 319 p., 44,95 $.
  • Le cerveau à tous les niveaux!
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