Vie de famille
Voyager avec ses enfants: supplice ou cadeau?
Photographe : Anne Villeneuve
Partir en voyage en famille comporte son lot de surprises, bonnes ou mauvaises. Notre chroniqueuse l'a fait, toute seule avec ses deux garçons. Témoignage.
«Tu t’en vas... où?» C’est ce qu’on me répondait quand je nommais la destination choisie pour mes garçons et moi à la relâche. Sûrement qu’ils s’attendaient à ce que je dise qu’on partait à Punta Cana. «Non, non, Taiwan. oui, oui, juste nous trois.»
C’est vrai que c’est surprenant, mais sortir des sentiers battus et voyager avec ses enfants l’est toujours un peu. «C’est dangereux, non? (Du tout.) Vous allez être malades... (Un peu, quand même.) Vous ne parlez pas mandarin... (Merci Google Translate.) Tu vas revenir épuisée... (Pour une bonne cause.)» Ma mère ne manquait pas d’arguments pour me faire comprendre que j’étais folle de me lancer dans l’aventure.
Bon, peut-être un peu. Mais voyager fait partie de mon ADN, et tous les parents globetrotteurs doivent un jour se poser la question: on continue de voyager avec nos enfants ou on range nos valises pour quelques années, le temps que notre progéniture puisse transporter les siennes?
Ma copine Shannon est catégorique: «Voyager avec mes gars de 7, 6, et 3 ans? Non merci! Mes vacances sont précieuses et j’ai besoin qu’elles me reposent, pas qu’elles m’épuisent!» Elle évoque l’inconfort de partager une chambre d’hôtel à 5, le coût prohibitif des billets d’avion, les dérangements à la routine, la patience qu’il faut pour endurer un enfant de trois ans qui n’en a pas. Autant de bonnes raisons d'acheter un chalet où elle couche ses gars à 19 h 30 et «profite de temps le soir pour décrocher». Je la comprends parfaitement.
Voyager avec ses enfants ressemble parfois à un exercice de funambule où on doit tenir en équilibre entre le désir de tout voir et la nécessité de tenir compte de leurs petites jambes et de leur capacité d’adaptation. Bien sûr, chaque enfant est différent, et lorsque notre bébé refuse de dormir ailleurs que dans son lit, ça m’étonnerait qu’on soit portée à se mesurer à 20 heures d’avion pour traverser le Pacifique. Comme parents, nous sommes les mieux placés pour connaître nos loulous. Et donc, pour respecter leurs besoins.
Mais la qualité de présence qu’on peut leur offrir en voyage en vaut l’effort, me dit Mara Gorman, auteure du blogue américain primé travelwithkids.com. «Le voyage est un moyen sans pareil d’avoir de bons moments avec nos enfants, loin des tracas et des responsabilités du quotidien.»
Mieux encore, dit-elle, le voyage permet de prioriser l’expérience plutôt que les bébelles. «Voir du pays, rencontrer des gens d’un peu partout est tellement plus satisfaisant que d’accumuler des objets. C’est vrai pour les adultes, mais aussi pour les enfants.» Et que fait-elle de l’argument que les enfants ne s’en souviendront peut-être même pas? «Je m’en fous; je m’en souviens, moi! Quand je vis un moment difficile, je revisite dans ma tête la première fois que je les ai accompagnés au sommet de la tour Eiffel. Et je souris.»
Comme Mara, je pense que mon aîné a déjà oublié le kit Lego qu’il a reçu pour ses 9 ans, mais il risque de se rappeler l’émoi de voir les cerisiers en fleurs ou les odeurs du marché de nuit où on a mangé... on ne sait trop quoi. Et d’apporter, je l’espère bien, cette curiosité avec lui dans d’autres aventures et dans sa vie de tous les jours.
On part où, là?
Andrée-Anne Guénette est maman de deux garçons de 7 et 10 ans.