Vie de famille
Quand maman manque (cruellement) de sommeil
Anne Villeneuve Photographe : Anne Villeneuve
N’avoir qu’une chose en tête: dormir, dormir et dormir encore. Une réalité avec laquelle doivent composer la plupart des parents de jeunes enfants. Les confidences de quelques mamans et l’avis d’une spécialiste.
Ce matin, je devais aller courir avant d'écrire cette chronique. Seulement, vers 2 h 45 du matin, ma fille de 6 ans s'est mise à vomir, par la suite celle de 4 ans a fait pipi au lit et, comble de malheur, j'ai dû aller faire la file, à 5 h 30, à la clinique du quartier pour obtenir un rendez-vous pour ma plus vieille de 15 ans, qui s'était blessée au pied la veille!
Manquer de sommeil quand on est une jeune maman (ou un jeune papa), c'est attendu. Mais quand les enfants vieillissent et qu'ils nous font passer une nuit blanche, on se demande toujours comment on a pu survivre à l'époque où ils étaient bébés. Vous savez, cette période où on allaite la nuit, où on se lève régulièrement pour gérer des terreurs nocturnes ou des otites et où on finit toujours par accueillir un enfant (ou deux ou trois) dans notre lit?
La romancière Kim Thuy, mère de deux enfants, dont un qui est atteint d'autisme, me confiait récemment avoir connu, elle aussi, cette grande fatigue due aux nuits blanches en série. «Pendant quatre ans, mon fils autiste se réveillait entre 2 h et 4 h du matin. Même si mon conjoint et moi, on se relayait la nuit, il n'était pas rare que je ferme les yeux au volant de ma voiture quand le feu de circulation passait au rouge.»
Ses trucs de survivante? Grignoter en auto pour combattre l'endormissement, garder espoir - croire que chaque nuit sans sommeil est la dernière des dernières -, faire garder les enfants pour avoir une bonne nuit de sommeil et dormir à chaque occasion. Par exemple, si elle arrivait à la garderie pendant la sieste de son fils, elle n'hésitait pas à prendre un tapis pour se coucher à ses côtés avant de reprendre la routine du soir.
Pour sa part, mon amie Isabelle a eu son troisième enfant alors qu'elle en avait deux autres de 4 et 2 ans. Elle se souviendra toujours de ses journées entières passées à allaiter couchée sur le sol, somnolente, avec ses autres enfants qui jouaient sur et autour d'elle. «Je savais que je devais profiter des siestes de bébé pour dormir pendant la journée, mais, avec les autres enfants à surveiller, je croyais bien ne jamais pouvoir rembourser ma dette de sommeil.»
Les siestes, c'est bien, croit la Dre Diane Boivin, directrice du Centre d'étude et de traitement des rythmes circadiens à l'Institut Douglas, mais il faut réussir à protéger une période consolidée de sommeil nocturne. «Passer trop de nuits sur la corde à linge n'est pas sans effet, insiste-t-elle. Au début, on est irritable, émotive et impatiente. Puis, au fil du temps, on constate une diminution de la vigilance au volant, de la concentration et de l'attention. On peut même sombrer dans la dépression.»
On sait que la privation de sommeil est utilisée pour torturer les prisonniers. Avec quatre enfants qui ne dormaient pas beaucoup, je dis souvent à la blague que j'ai fait le camp de Guantanamo! Après mon congé de maternité pour ma troisième fille, la privation de sommeil me rendait particulièrement impatiente en fin de journée. Au bureau, je manquais de concentration. Il m'arrivait même d'oublier ce qu'on m'avait demandé la veille ou de faire plusieurs fautes d'orthographe dans un même texte.
Curieusement, mon conjoint ne semblait pas souffrir autant de ses nuits écourtées. «Les besoins de sommeil varient d'un individu à l'autre, précise Dre Boivin. Certains sont fonctionnels avec moins de 6 heures de sommeil par nuit, tandis que d'autres doivent en dormir plus de 10.»
Cela dit, n'envions pas les parents qui n'ont presque pas besoin de sommeil ou ceux (parfois les mêmes) qui ont des bébés dormeurs. Il y a une justice au pays de Morphée: ils dormiront tous à l'adolescence!
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