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Allaitement: les bienfaits pour bébé... et maman

Allaitement: les bienfaits pour bébé... et maman

Auteur : Coup de Pouce

Entre les conseils contradictoires et les belles et moins belles histoires, on a parfois du mal à démêler le vrai du faux. Voici enfin des réponses fiables à nos interrogations.

Six mois après la naissance de Mathis, Myriam s'émerveille encore: «Ce petit être a grandi en moi pendant neuf mois et, maintenant, je continue à le faire vivre avec le lait que produit mon corps. J'en tire une grande fierté! Et ça fait tellement de bien à l'âme de connaître plusieurs fois par jour ce contact très intime avec lui.»

Au Québec, entre 80 % et 85 % des nouvelles mamans allaitent. Une évolution remarquable, compte tenu qu'il y a 10 ans seulement ce taux était inférieur à 50 % et presque nul il y a 40 ans. «En deux ou trois générations, l'allaitement avait complètement disparu du paysage, note le Dr Pierre Lévesque, obstétricien-gynécologue au Centre hospitalier régional de Rimouski et membre des Comités canadien et québécois pour l'allaitement. Les mères et les grand-mères des femmes qui accouchent aujourd'hui n'ont pas allaité. C'est donc toute une culture qu'il faut recréer.»

Allaiter: bon pour bébé et pour maman

C'est au cours des années 1980 que l'allaitement a repris ses lettres de noblesse en Amérique du Nord, en même temps que les études scientifiques montrant ses bienfaits se multipliaient. En effet, il est prouvé qu'il diminue le risque et la gravité des méningites bactériennes, des otites moyennes et des infections respiratoires, urinaires et gastro-intestinales chez les bébés. Les preuves s'accumulent également à l'effet qu'il diminuerait le taux de mort subite du nourrisson et protégerait à long terme contre l'obésité, les maladies cardiaques, le diabète, les allergies, la leucémie, l'asthme (ces résultats restent toutefois à valider). Le lait maternel est l'aliment optimal pour les nourrissons, estiment tous les organismes de santé publique. En mars dernier, la Société canadienne de pédiatrie augmentait sa recommandation d'allaitement exclusif à 6 mois, contre 4 à 6 mois auparavant.

«C'est moins connu, mais l'allaitement a aussi un effet bénéfique sur la santé de la mère, indique Lydia Rocheleau, nutritionniste à l'Agence de développement de réseaux locaux, de services de santé et de services sociaux de la Montérégie. Quand on allaite, on reprend plus rapidement notre poids d'avant la naissance et on diminue notre risque de souffrir plus tard d'un cancer du sein, des ovaires et de l'utérus.» À la ménopause, les femmes qui ont allaité sont aussi moins affectées par l'ostéoporose.

Les avantages de l'allaitement ne se limitent pas à la santé. L'aspect pratique est aussi fort apprécié. Pas de biberons à stériliser, pas de formules à préparer et à réchauffer, sans compter que le lait maternel est gratuit, alors que les formules commerciales coûtent de 1 000 $ à 1 500 $ pour une année.


Allaitement: si l'envie nous manque

Le portrait n'est toutefois pas tout rose, estime Danielle Groleau, professeure au département de psychiatrie de l'Université McGill et chercheuse dans le domaine de l'allaitement: «Celles qui n'allaitent pas sont jugées parce qu'elles ne donnent pas ce qu'il y a de mieux à leur bébé. En même temps, celles qui allaitent ont peu de soutien lorsqu'elles vivent des difficultés techniques. Bref, beaucoup de ressources sont consacrées à la promotion de l'allaitement, mais encore bien peu à aider les femmes à persévérer.»

De son côté, le personnel de la santé reconnaît qu'il reste du travail à faire pour mieux soutenir les mères qui allaitent, mais se défend bien de culpabiliser les autres. «Au contraire des fabricants de formules commerciales, nous n'avons rien à vendre, note Suzanne Dionne, médecin au CSSS de la Haute-Yamaska et membre du Comité québécois pour l'allaitement. Par contre, nous voulons que les femmes disposent de toute l'information nécessaire pour faire un choix éclairé.»

Certaines mamans, pudiques, sont mal à l'aise à l'idée d'avoir un bébé au sein en public. Si c'est notre cas et qu'on aimerait quand même faire bénéficier notre enfant des bienfaits du lait maternel, Anne Hébert, infirmière au Centre des naissances du Centre hospitalier de l'Université de Montréal et consultante en allaitement, suggère d'extraire notre lait et de le donner au biberon lors des sorties.

Allaitement: réunir les conditions gagnantes

Sur le plan physique, aucune préparation particulière n'est nécessaire avant l'accouchement. La pratique visant à étirer les mamelons est complètement dépassée et risque même de les endommager. On évite simplement d'utiliser du savon, du parfum ou des produits à base d'alcool sur les mamelons quelques semaines avant l'accouchement et pendant l'allaitement, afin de ne pas enlever les lubrifiants naturels.

Pour Isabelle Cloutier, présidente de la Fédération québécoise Nourri-Source, la meilleure façon de se préparer consiste à s'informer le plus possible. «Les abandons surviennent surtout dans les quatre premières semaines, parce que les mamans ne s'attendent pas à connaître des difficultés et qu'elles hésitent à demander de l'aide. Parce que c'est naturel, elles s'imaginent que c'est facile. C'est vrai pour certaines, mais pas pour toutes!»

«J'étais prête à ne pas dormir et à passer tout mon temps à allaiter, mais je n'étais pas préparée à ressentir une telle douleur, raconte Kim, qui a cessé d'allaiter après une semaine. Mes seins saignaient et la douleur était très aiguë quand ma fille tétait. J'imagine que la prise du sein était inadéquate, mais j'ai eu si peur de continuer à avoir mal que je n'ai pas cherché à persévérer.»

Isabelle Cloutier conseille de lire beaucoup sur l'allaitement, de préférence des livres récents parce que les connaissances évoluent rapidement. Une autre bonne idée: prendre contact avec une marraine d'allaitement avant d'accoucher. «Si on a des difficultés, on saura immédiatement vers qui se tourner.»

La production de lait, par exemple, est méconnue. Plusieurs mamans craignent de ne pas en produire assez. Il s'agit même, selon une étude de Statistique Canada, de la principale raison invoquée par les mères qui cessent d'allaiter au cours du premier mois. Comme leur bébé boit souvent, elles croient qu'elles n'ont pas assez de lait pour le contenter. Or, un nouveau-né tète de 8 à 12 fois par jour. Et ces tétées fréquentes sont justement essentielles pour établir la lactation. Si bébé grossit et mouille six à huit couches par jour, tout va bien.

«J'allaitais mon fils toutes les heures, et il ne semblait pas rassasié, dit Myriam. J'étais découragée.» Ce problème, assez fréquent, est souvent l'indice que le bébé ne prend pas le sein correctement. Comme l'explique le pédiatre torontois Jack Newman, une sommité en allaitement, «une mauvaise prise du sein, c'est comme donner au bébé un biberon avec une tétine dont le trou est trop petit; le biberon est plein de lait, mais le bébé n'en prendra pas beaucoup.» Pour que la succion soit efficace, la bouche du bébé doit couvrir au moins 2 cm de l'aréole. S'il ne tète que le bout du mamelon, il ne boit pas. En moyenne, il peut s'écouler entre deux et six semaines avant que l'allaitement soit «placé» et agréable.

Après la naissance

Dans les secondes suivant la naissance, on tient notre nouveau-né tout contre nous, de préférence peau à peau. Cela renforcera son instinct de téter. «On ne lui met pas le mamelon de force dans la bouche, on laisse les choses aller, conseille Anne Hébert. Tout doucement, le bébé se mettra à chercher, son menton touchera le sein, il essaiera de lécher, puis il ouvrira grand la bouche et saisira le sein.» Pour l'aider, on peut exprimer un peu de colostrum, qui a le même goût et la même odeur que le liquide amniotique.

Et si on a eu un accouchement difficile, une césarienne, un bébé prématuré? «Encore une fois, le contact peau à peau est à privilégier, mais la maman doit être un peu plus patiente, explique la Dre Dionne. Le bébé peut avoir besoin d'un peu plus de temps avant de téter pour la première fois. Mais les difficultés sont rarement insurmontables.»

À l'hôpital, la cohabitation, désormais courante, est un autre facteur qui favorise l'allaitement. Ainsi, quand notre poupon commence à se réveiller pour une tétée (yeux qui remuent sous les paupières, mouvements, grognements, bruits de succion, etc.), on émerge du sommeil tout doucement. La DreDionne ne recommande pas de réveiller le nourrisson la nuit pour le nourrir, sauf s'il est prématuré ou s'il ne prend pas suffisamment de poids (dans ce cas, on demande l'avis du pédiatre). Mieux vaut allaiter à la demande, sans horaire fixe.

On tient à allaiter, mais on souhaite donner un biberon à l'occasion? Avant d'introduire le biberon, on attend que bébé ait bien appris à téter, soit 4 à 6 semaines. Sinon, on risque de compromettre l'allaitement, car les bébés ont tendance à adopter la méthode qui leur fournit du lait le plus rapidement et le plus facilement...

Les petits bobos reliés à l'allaitement

Trois jours après avoir mis sa fille au monde, Mélanie a fait des gerçures aux seins. «La douleur était très aiguë au début des tétées, puis s'estompait. J'ai essayé de guérir mes gerçures en appliquant du lait maternel et de la lanoline purifiée Lansinoh, mais rien n'y faisait.» Après deux semaines, elle a craqué. «Juste à penser que je devais allaiter, je paniquais.» En pleurs, elle a appelé Nourri-Source. Elle y a trouvé de l'écoute et plein de conseils. Elle a aussi contacté une infirmière du CLSC, qui est venue la voir pour corriger le positionnement du bébé.

Ça fait mal? Stop! Toute douleur est un signal d'alarme. Au début de la tétée, on peut ressentir une légère sensibilité, un peu comme si on se faisait pincer, mais sans plus. Si la douleur est plus forte ou persiste, on consulte une personne-ressource sans tarder. Souvent, la douleur est causée par une position inadéquate ou une mauvaise prise du sein. En demandant de l'aide, on évite que la situation ne dégénère en un problème plus grave. Les gerçures et les crevasses, par exemple, sont souvent causées par une mauvaise prise du sein.

L'engorgement est un autre problème courant. Nos seins sont lourds, chauds, douloureux et gonflés. On fait parfois un peu de fièvre. Pour se soulager, on applique du froid (glace concassée dans une débarbouillette, pois congelés dans un sac) pendant 10 minutes entre chaque tétée. Quand l'enflure a diminué, on applique une compresse chaude pendant 2 minutes juste avant d'allaiter. Sous la douche, on masse délicatement nos seins.

La mastite se voit aussi fréquemment. Le sein présente une rougeur et on ressent une douleur importante dans une zone précise. Parfois, on fait de la fièvre et on se sent courbaturée. On peut alors prendre de l'ibuprofène. Avant chaque tétée, on applique des compresses chaudes pendant quelques minutes et on masse la zone douloureuse pour drainer le lait vers le mamelon. On continue de masser pendant la tétée. Si la situation ne s'améliore pas après 24 heures, on consulte un médecin, qui pourra nous prescrire un antibiotique, s'il y a lieu.

«Une copine m'a dit: "Si tu arrêtes d'allaiter, tu le regretteras peut-être, mais tu ne regretteras jamais d'avoir persévéré", se souvient Mélanie. Elle avait bien raison! Je suis très contente de m'être entêtée et d'avoir surmonté les difficultés. J'ai allaité Simone pendant neuf mois, je lui ai donné le meilleur aliment possible et j'ai vécu une expérience formidable.»

Allaitement: du soutien, svp!

Le soutien et la compréhension de notre conjoint sont primordiaux pour le succès de l'allaitement. Il est donc bon qu'il assiste lui aussi aux réunions d'information et lise sur le sujet. Et si papa craint que cela ne l'empêche de créer des liens avec son bébé, qu'il se rassure! Bercer bébé, le cajoler, le bercer, lui donner le bain, le masser, chanter pour lui, le promener dans un porte-bébé sont autant de moyens de nouer une relation d'attachement.

Malheureusement, on ne peut pas toujours compter sur nos proches pour obtenir le soutien moral dont on a besoin. Insidieux, les commentaires du genre «Es-tu certaine que tu as assez de lait?», «Il a peut-être encore faim?» ou «Pourquoi tu ne lui donnes pas un biberon?» peuvent saper notre détermination. Isabelle Cloutier propose de préparer le terrain avant l'accouchement en faisant part de notre décision à notre entourage et en demandant qu'elle soit respectée.

Aussi, on évite de partager nos doutes et nos difficultés avec les gens qui ne sont pas en accord avec notre choix. Mélanie, qui a vécu un départ difficile, n'en a pas soufflé mot à sa mère. «Je savais qu'elle ne comprendrait pas mon acharnement et qu'elle m'inciterait à passer au biberon. J'ai donc préféré me taire.»

Aux gens négatifs, on peut répondre: «J'ai choisi de donner le meilleur aliment à mon enfant.», «J'ai fait beaucoup de recherches sur le sujet.», «La Société canadienne de pédiatrie recommande d'allaiter les bébés au moins six mois.» ou encore: «C'est une décision très personnelle.»

Pour aller plus loin

Ressources
Nourri-Source. Service gratuit de marraine d'allaitement, rencontres d'information pré- ou postnatales, haltes allaitement. Infos: (514) 948-5160.
Ligue La Leche. Soutien téléphonique, rencontres d'information et d'entraide. Infos: 1-866-allaiter.
• Notre CLSC, pour recevoir la visite d'une infirmière en cas de difficultés et obtenir les coordonnées des groupes de soutien en allaitement de notre région.

Lectures
Le Petit Nourri-Source, par Nourri-Source, 2004, 194 p., 6 $ plus 3,50 $ frais de port. Pour commander: (514) 948-5160.
L'Art de l'allaitement maternel, par la Ligue La Leche, 2005, 460 p., 25 $ plus 8,50 $ de frais de port. Pour commander: 1-866-allaiter.
L'Allaitement maternel, par le Comité pour la promotion de l'allaitement maternel de l'Hôpital sainte-Justine, Éditions de l'Hôpital Sainte-Justine, 2002, 104 p., 14,95 $.
Maman chérie, site de Stéphanie Dupras, consultante en lactation et doula. Beaucoup d'informations dont les textes du Dr Jack Newman.

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