0-5 ans
Aider notre enfant à gérer ses émotions
La relaxation pour les enfants, un concept farfelu? Pas du tout, répond la thérapeute pour enfants Stéphanie Couturier. Quelques bonnes idées pour aider nos enfants à se calmer, à gérer les crises et à mieux dormir.
Stéphanie Couturier reçoit dans son bureau de Paris des enfants qui vivent, comme tous les enfants, des «débordements émotionnels». Psychomotricienne et sophrologue, elle propose d'apaiser les émotions par une rééducation du corps. Concrètement, cela peut passer par la respiration, des étirements et exercices doux et de la visualisation, des techniques qui aident les enfants à reprendre le contrôle sur leur corps et leur tête. Elle a colligé les meilleures dans un livre paru récemment, Mon cours de relaxation pour les enfants: Exercices et textes pour apaiser les émotions et faire grandir la confiance en soi. Un vrai guide pratique abordable et facile à lire, son livre propose des stratégies que n'importe quel parent peut mettre en pratique avec son enfant. On l'a rejointe à Paris pour qu'elle nous en parle.
De la relaxation pour les enfants, est-ce un concept farfelu? Les enfants ont-ils vraiment besoin de se relaxer? Oui, tous les enfants gagnent à pratiquer des exercices de respiration et de relaxation, car ça apporte une solution immédiate à des problématiques que tous peuvent vivre: une grosse colère, une journée qui se passe mal, un chien ou une araignée qui cause une grosse peur, des troubles d'endormissement. On a l'impression que les problèmes des enfants ne sont pas graves: on a tort! Les adultes peuvent avoir du recul face à un problème, car ils savent relativiser. L'enfant ne peut pas faire ça: la dispute avec son ami, il ne peut pas passer par-dessus, elle prend toute la place dans sa vie. Si nos émotions sont fortes, les leurs le sont plus encore. C'est à nous, comme parents, de les aider à avoir du recul. Souvent, je propose de passer par l'imagination et la respiration.
Dans le livre, vous êtes catégorique: il ne faut pas poser d'étiquette sur notre enfant, comme par exemple: «Il est colérique.» ou: «Elle est braillarde.» Pourquoi? Moi, petite, on m'avait cataloguée comme colérique. Mais ça me mettait en colère de me faire dire ça. L'enfant est enfermé dans ses émotions, il les subit, mais il n'est pas ses émotions! Il ne faut pas, comme parent, tout mélanger. Il faut prendre du recul et nommer les choses: «C'est un moment difficile pour toi, tu es très en colère. Tu as le droit d'être en colère, mais si tu veux frapper, tu peux frapper dans un coussin, pas ta maman.» Ce n'est pas toujours facile, mais notre rôle de parent est de parler à notre enfant. On peut, par exemple, lui proposer de petits défis: par exemple, s'il est très timide, on lui demande simplement de venir saluer les gens en visite. Chaque fois qu'il réussit, on fête la victoire, on surfélicite. On l'aide ainsi à reprendre confiance en lui. Il ne réussit pas? On ne se fâche pas, on essaie une autre fois.
En principe, cela semble tout beau. Mais dans les faits, on peut vraiment aider un enfant de 2 ans à cesser de faire des crises? Oui. À un enfant en crise, on peut offrir d'aller crier dans sa chambre ou de frapper un coussin plutôt que de nous frapper. Et après la crise, lorsque l'enfant est apaisé, on en reparle, en donnant à notre enfant des images pour parler des émotions. Par exemple: «Ta colère était très grande. Tu es devenu tout rouge, comme ton ballon dans la cour!» En mettant des images sur les émotions, on donne à notre enfant des outils pour mieux les comprendre. Il faut déculpabiliser nos émotions: elles sont là, il faut seulement mieux les gérer. Ne pas oublier, non plus, d'envelopper notre enfant dans nos bras une fois l'émotion passée, pour qu'il se sente toujours aimé malgré les colères. On n'hésite pas à inclure notre enfant dans la recherche de solutions. Déjà, à 2 ans, on peut lui demander: «Qu'est-ce que tu peux faire quand tu as une grosse colère plutôt que de frapper Maman?» Bien sûr, on peut aussi lui proposer des pistes, comme la respiration.
Dans votre livre, vous proposez plusieurs exercices qui ont la respiration comme point de départ. Vous écrivez: «Les exercices de respiration vous aideront à libérer les tensions accumulées et ainsi à mieux faire circuler les émotions.» Concrètement, on fait comment avec notre enfant? Il faut trouver des images pour qu'ils visualisent bien la respiration. Je propose, par exemple, de visualiser les poumons comme les ailes d'un papillon qui se déploient à l'inspiration et qui se reposent à l'expiration. On propose donc à l'enfant de faire «voler son papillon» trois ou quatre fois, en inspirant et en expirant lentement. Dans mon cabinet, je travaille la respiration des tout-petits avec des petites plumes. On s'allonge au sol, et on souffle doucement et longtemps pour que la plume s'envole doucement et longtemps. J'accompagne les enfants, en exagérant les mouvements. Les enfants apprennent en imitant. Les parents peuvent en faire autant. Je propose aussi une technique que j'appelle Respiration koala, une respiration à deux, ventre contre ventre. On prend notre enfant sur nos cuisses, dans nos bras, comme des koalas, et on respire à l'unisson de façon calme, douce, et pas trop longue.
J'ai moi-même essayé la respiration koala avec mes garçons de 5 et 7 ans. Coup de cœur! Je me calme autant qu'eux et ça s'avère un moment privilégié qui termine bien leur journée. Mais on peut difficilement faire cela avec nos ados! Qu'est-ce qu'on peut faire pour les aider à gérer des émotions difficiles? Avec les adolescents, la respiration est un outil efficace. Il suffit d'utiliser des images adaptées à leurs passions et leurs envies. Par exemple, si notre jeune est fan de jeux vidéo, on peut rapporter le stress à celui qu'il vivrait en jouant à son jeu préféré. Durant tel jeu de course, au moment d'effectuer une manœuvre difficile, il peut reconnaître un stress particulier. Et alors, là, prendre une grande respiration. C'est une technique qu'il peut ressortir de façon systématique lorsqu'il reconnaît le stress dans d'autres moments de sa vie, comme un examen, une dispute entre amis, etc. On peut aussi utiliser le dessin et l'écriture pour gérer des peurs, des conflits avec un professeur ou un parent. On profite de l'exercice pour déposer les émotions sur papier. Libre à lui, s'il le souhaite, d'ensuite le déchirer, le découper, le mettre en boule, sauter dessus... n'importe quoi pour extérioriser l'émotion.
Mon cours de relaxation pour les enfants: Exercices et textes pour apaiser les émotions et faire grandir la confiance en soi, par Stéphanie Couturier, Marabout, 2015, 139 p., 22,95$.