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Le Rallye des Gazelles: une expérience de vie

Le Rallye des Gazelles: une expérience de vie

Au premier drapeau, nous sommes si contentes de faire approuver notre passage que sans l'intervention d'un journaliste, qui nous rappelle de sortir de notre véhicule, nous n'aurions aucune photo de ce moment! Cliquez sur la flèche pour voir plus... Auteur : Coup de Pouce

Traverser le désert du Maroc en 4 x 4 avec comme seuls instruments une boussole et des cartes topographiques vieilles de 40 ans, voilà en quoi consiste le défi lancé par le Rallye Aïcha des Gazelles, qui attire les Québécoises depuis 1990. Curieuses de vivre l'expérience du désert et désireuses de nous prouver que nous pouvions affronter une telle épreuve, ma sœur Isabelle et moi nous sommes lancées dans l'aventure avec enthousiasme.

Nous en sommes revenues épuisées, enchantées et légèrement transformées. Affronter au quotidien le désert, la chaleur, la solitude et l'insécurité nous a rapprochées. Quant à moi, dix jours de joie, de frustration et d'obstacles m'ont amenée à affronter mes peurs et à apprendre l'humilité et la confiance. Mais aussi à découvrir le désert, dont je suis tombée amoureuse dès le premier jour.

2500 kilomètres hors piste dans le désert

Né de l'initiative de la Française Dominique Serra, le Rallye Aïcha des Gazelles est une course féminine de 2500 kilomètres hors piste dans la portion marocaine du désert du Sahara. Le trophée n'est pas remis à l'équipe la plus rapide, mais à celle qui trouve toutes les balises en franchissant le moins de kilomètres possible. On a donc avantage à connaître la navigation et à user de stratégie quand vient le temps de choisir entre un passage long et facile et un autre plus accidenté qui réduit la distance parcourue.

 

De longues et épuisantes journées

Les journées du rallye sont longues. Tous les matins à 4 h, deux Marocains en djellaba circulent entre les tentes, sonnant le réveil au tam-tam. Un rapide détour au camion-conteneur qui abrite les toilettes, puis direction petit-déjeuner. Pendant que ma sœur s'enquiert des instructions de la journée et prépare notre parcours, je récupère le 4 x 4 dans l'enclos des mécaniciens, fais le plein, démonte la tente, récupère les rations d'eau et charge le véhicule. À six heures, nous sommes sur la ligne de départ, des papillons dans l'estomac.

Si je me sais habile conductrice, je ne suis pas certaine d'avoir bien assimilé les notions de navigation. Je vais donc devoir me fier aveuglément à ma partenaire, à qui reviendra la tâche de nous orienter jusqu'à la fin du rallye, tandis que je tiendrai le volant.

Un moment de panique

Le troisième jour, en tournant en rond à la recherche de l'une de balises, j'ai un moment de panique à l'idée d'être perdue au milieu du désert. Ma confiance en mes capacités est sérieusement ébranlée. Ma sœur s'efforce de me rassurer en m'indiquant sur la carte notre position approximative. D'après elle, on ne peut jamais être perdues. Et moi, j'ai pu voir que ça passe partout, un 4 x 4!

La chaleur, le manque de sommeil, le stress de conduire dans le sable et d'avoir à s'orienter dans un environnement loin de leurs repères familiers ont raison de la résistance de la plupart des participantes à un moment ou à un autre. J'atteins mes limites physiques et morales au septième jour de la course.

Malade de déshydratation

Je me revois, assise au sommet d'une dune de trois mètres de haut, à côté de mon 4 x 4 ensablé sur la crête d'une pente frôlant les 45 degrés. Après m'être lancée à pleine vitesse à travers le désert, je viens de freiner brutalement effrayée par la pente et obsédée par l'image de cet ancien participant du rallye Paris-Dakar, rencontré il y a peu de temps, qui est resté handicapé après avoir fait des tonneaux dans les dunes.

Les encouragements de ma sœur et de l'équipe de dépannage appelée en renfort ont raison de mes craintes. Mais je n'ai aucun souvenir de m'être glissée derrière le volant pour me laisser traîner en bas de la dune... Je me rappelle par contre les mécaniciens nous offrant de remplacer notre pneu alors que nous avions déjà utilisé nos deux roues de secours.

Une réparation de fortune nous permet de nous joindre au convoi de retour pour le bivouac. Épuisée, en partie déshydratée - malgré l'absorption d'au moins trois litres d'eau -, je régurgite à chaque arrêt. Heureusement, un collègue journaliste qui suit la course a accepté de prendre le volant à ma place. Au campement, je cours à la cuisine pour trouver des oranges qui, je l'espère, me fourniront un peu de vitamines et m'aideront à me remettre. Puis, trop fatiguées pour monter la tente pour deux heures de sommeil, nous déplions nos sacs de couchage et nous endormons en regardant les étoiles. Un moment de magie après cette journée harassante.

Le lendemain, c'est au tour de ma sœur de perdre patience et de me menacer de m'assommer avec la pelle qu'elle maniait quelques secondes plus tôt avec acharnement dans les dunes parsemées d'herbe à chameaux, alors que les mouches nous harcèlent et que j'insiste pour qu'elle boive davantage.

Des performances étonnantes

Je garderai surtout du rallye des souvenirs d'expériences de conduite que je ne retenterais sans doute pas. Le huitième jour, la nuit tombe quand nous empruntons une piste pour franchir la montagne qui nous sépare du campement. Le chemin en lacet est si étroit que je dois m'y prendre à deux fois pour franchir certains virages. Je sens l'angoisse d'Isabelle qui, agrippée à la portière, entend les pierres dévaler le long du précipice... Quel soulagement d'atteindre le sommet!

Quelques jours plus tôt, c'est moi qui ai eu la frousse en cherchant un passage entre de petites dunes de sable et une montagne. Isabelle marchait pour m'indiquer la voie. Les dunes étaient de plus en plus grosses, ce qui m'obligeait à grimper sur le flanc de la montagne, tapissé de galets plats. Les roues de la camionnette glissaient. Il ne fallait surtout pas que la portière touche le sable. Sinon, nous aurions été incapables de sortir. J'avais les muscles contractés, la sueur perlait sur mon front. Nous avons avancé ainsi sur près de 500 mètres. Je n'ai pu m'empêcher de sauter de joie lorsque nous avons atteint un plateau recouvert de roches volcaniques, noires, brillantes et effilées.

Une nuit à l'oasis

La soirée de l'étape marathon de deux jours sans campement sera l'une des plus marquantes. Avec trois ou quatre autres équipes, nous avons rendez-vous à la dernière balise de la journée. Finalement, le bivouac s'improvise dans une oasis située à quelques kilomètres de là. Les villageois nous reçoivent avec chaleur, nous autorisant même à déposer nos bouteilles de mousseux au frais dans leur puits. Et le summum: ils nous offrent la douche! De jeunes garçons nous vident de l'eau - une denrée précieuse dans cette région - sur la tête, nous permettant de nous laver les cheveux et de retirer la couche de sable qui nous recouvre. Autour du feu, les rations de l'armée fournies par l'organisation n'ont jamais eu si bon goût.

Note: pour les curieux, nous avons terminé 19e au classement final des 52 équipes inscrites.

Un an de préparation

Enseignantes, ingénieures, mères de famille ou journalistes, les participantes consacrent en moyenne un an à se préparer à l'aventure. Dans notre cas, ç'a été 11 mois à courir les commandites pour amasser les 30 000 $ nécessaires pour payer l'inscription, les cours de techniques d'orientation, la location du véhicule, les billets d'avion et l'équipement indispensable à l'aventure. Dans nos bagages s'entassaient un compresseur, un cric hydraulique, une pelle, un coffre à outils, une tente, du matériel de navigation, des casques protecteurs, des lunettes anti-sable et une trousse de premiers soins. Les plaques de désensablage (des plaques de métal d'un mètre de long qu'on glisse sous les roues) sont louées auprès de l'organisation, qui se charge aussi du ravitaillement en essence, eau et nourriture.

 

 

La version originale de cet article a été publiée sur le site Servicevie.com.

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