Loisirs et culture
Brave comme le Larousse
Larousse ou Robert? Dans mon travail de réviseur-correcteur, j'utilise le Petit Robert, considéré, m'a-t-on inculqué à mes débuts, comme le seul dictionnaire «normatif» de la langue française. Une notion à laquelle je suis un tantinet rébarbatif: à mes yeux, c'est l'usage qui est normatif. Mais j'avoue qu'il est précieux de pouvoir trouver les mots ou expressions que l'on cherche «en contexte»; cela permet de mieux les cerner.
Cela dit, j'admire la bravoure du Larousse, qui n'hésite pas, année après année, à intégrer des mots nouveaux: «plus de 3 000 nouveaux mots, sens ou expressions et... quelque 150 nouveaux noms propres dont plus de 60 artistes, écrivains, scientifiques ou sportifs», lisait-on dans Cyberpresse la semaine dernière. Et j'applaudis le fait qu'on y trouve désormais des mots comme filovirus ou corium, qui font autant partie de notre réalité que le virus Ebola ou la catastrophe de Fukushima. Et pas besoin d'attendre qu'un comité de grands-pères à perruque statue que ces réalités existent bel et bien.
Par contre, ce qui m'agace un peu dans chaque nouvelle édition, c'est le même empressement, la même naïveté, à intégrer des noms de gens connus. Parce que là, les choix (et je ne parle pas juste des derniers en date) reflètent des jugements de valeur. Leonardo DiCaprio? Et pourquoi pas Christian Bale ou Daniel Day-Lewis? Les Rolling Stones? Et pourquoi pas Frank Zappa ou Eric Dolphy? Dany Laferrière? Je veux bien, mais où est Gauvreau? Sans parler des entrées qui sentent le gros provincialisme: Claude François? Line Renaud?
En passant, je ne peux m'empêcher de me demander si quelqu'un fait du nettoyage dans tous ces noms (ceux des politiciens, par exemple) une fois qu'ils sont «passés date», comme on dit par ici. Jean Charest et Jacques Parizeau à jamais dans le dictionnaire? Allons! L'Histoire ne peut pas nous faire ça!