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L'acupuncture contre la douleur

L'acupuncture contre la douleur

? iStockphoto.com Photographe : ? iStockphoto.com Auteur : Coup de Pouce

L’acupuncture, longtemps considérée comme ésotérique, a fini par piquer la curiosité des chercheurs. On comprend maintenant de mieux en mieux pourquoi les aiguilles soulagent.

Plusieurs se soumettent volontiers au «supplice» des aiguilles, celles qui permettent au corps de rééquilibrer ses énergies et qui apportent un soulagement à certains maux. Ces aiguilles, beaucoup plus fines qu'une aiguille de seringue, semblent même agir sur les douleurs. Elles sont plantées sur le corps le long de trajets énergétiques appelés «méridiens». Elles font partie des outils d'une science vieille comme le monde, l'acupuncture, qui a de plus en plus d'adeptes au Québec.

Mais que sait-on de cette science qui se propage en Amérique avec une vigueur toute asiatique? Et que peut faire cette méthode de traitement pour les  nombreuses conditions cliniques douloureuses face auxquelles la médecine rationnelle éprouve tant de difficulté? Nous verrons ici quelques-uns des bienfaits de l'acupuncture, en particulier dans le traitement de la douleur.

L'acupuncture au Québec: acceptée depuis peu

L'acupuncture a mis du temps avant de rejoindre le Québec. Développée en Orient, elle a d'abord dû subir l'épreuve de la «méthode scientifique». Sur nos rivages, toute approche thérapeutique doit d'abord être prouvée efficace (et sans danger) pour pouvoir être utilisée à grande échelle. Pas étonnant que le Collège des médecins du Québec (CMQ) ait accepté de superviser les acupuncteurs au début des années 1990, le temps que soit créé l'Ordre des acupuncteurs du Québec. Mais y a-t-il un domaine plus difficile à investiguer que celui des «énergies»? Pourtant, dans ces années de probation, on a montré, par la méthode expérimentale, l'efficacité de l'acupuncture dans plusieurs conditions cliniques. Il devenait alors acceptable de s'y associer, même si les philosophies qui les sous-tendent se heurtent à plus d'un point de vue à la médecine rationnelle. Il n'est donc plus interdit pour un médecin québécois de référer son patient à un acupuncteur, s'il estime avoir épuisé tous les moyens que sa science met à sa disposition.

Pour pratiquer l'acupuncture au Québec, il est obligatoire de suivre une formation spécialisée dans un collège reconnu. L'époque où des médecins pouvaient suivre des formations complémentaires et pratiquer l'acupuncture est révolue.

Une science mais aussi une philosophie

L'acupuncture n'est pas qu'affaire d'aiguilles. Ses principes les plus fondamentaux conçoivent l'homme comme étant un produit de la matière (de nature yin) et de l'énergie (de nature  yang) et que toute perturbation de ces composantes peut bloquer l'énergie (le Qi) et engendrer la maladie. Toujours selon cette science, des blocages surviennent sur des trajets d'énergie (les méridiens), provoquant l'accumulation d'énergie en amont et une perte d'énergie en aval. Les aiguilles, entre autres moyens, permettent de diriger le cours des énergies pour que le corps puisse rétablir son équilibre énergétique.

Grâce aux techniques modernes de visualisation des activités cérébrales (résonance magnétique fonctionnelle et tomographie par émission de positrons, ou TEP), il est maintenant établi que l'acupuncture agit sur les centres cérébraux contrôlant les émotions et sur le système nerveux autonome.

L'efficacité de l'acupuncture sur la douleur chronique

Si l'on se fie aux témoignages des acupuncteurs, l'acupuncture permettrait de soulager plusieurs types de douleur: arthrite et arthrose, douleurs thoraciques atypiques, côlon irritable, dysménorrhée, douleurs pelviennes, douleurs articulaires, céphalées migraineuses et de tension, spasmes musculaires, névralgie de toute origine (trigéminée, post-herpétiques, etc.), entorses et contusions, fasciite plantaire et douleur fantôme. Mais que dit la science biomédicale à ce sujet? Quelles sont les conclusions des publications répertoriées sur les moteurs de recherche scientifiques?

Il faut rester prudent. Plusieurs études publiées à ce jour présentent des lacunes méthodologiques. Par exemple, certaines n'avaient pas de groupe «placebo». Le groupe placebo est celui où les patients subissent une simulation du traitement, croyant subir le traitement réel. Sur eux, les aiguilles sont plantées superficiellement, en dehors des points d'acupuncture reconnus: cela permet de vérifier si c'est bien le traitement qui donne des résultats ou si c'est l'autosuggestion du patient, confiant d'être pris en charge. En acupuncture, la procédure du placebo se nomme «sham acupuncture». Sans un tel groupe contrôle, il est impossible de savoir, dans le cas où des résultats se produisent,  si ce n'est «l'effet placebo» qui est en cause.

Heureusement, ces précautions ont été respectées dans d'autres études réalisées récemment. Il a été ainsi possible de confirmer l'efficacité de l'acupuncture dans le traitement de divers types de douleur: douleurs dentaires, douleurs lombaires, douleurs d'ostéoarthrite, douleurs reliées à l'accouchement et, possiblement, la douleur d'origine cervicale et la douleur temporo-mandibulaire. Par contre, l'acupuncture s'est avérée sans effet sur d'autres types de douleur (cancéreuse, fibromyalgique, céphalée de tension). Comment la médecine d'aujourd'hui s'explique-t-elle ce qui se produit quand un patient est soulagé de sa douleur par l'acupuncture?

Mécanismes impliqués dans l'acupuncture

Depuis 2002, on a réussi à mieux mettre en évidence le rôle de l'acupuncture comme stimulant des mécanismes naturels qui contrôlent la douleur. Ces mécanismes sont appelés les «contrôles inhibiteurs des influx nociceptifs» (ou CIDN) et mettent en jeu plusieurs neurotransmetteurs dont la sérotonine, la noradrénaline et les endorphines. Ces neurotransmetteurs, produits par le tronc cérébral qui se trouve près du cou, sont libérés dans la moelle épinière de manière diffuse. Cela permet notamment la stabilisation de l'activité des neurones impliqués dans la transmission du message de la douleur à travers la moelle épinière.

Les précautions

Dans certains pays, rarement au Canada, on croit que les aiguilles de l'acupuncteur, au même titre que les injections avec du matériel non stérile, peuvent être responsables de la transmission de l'hépatite C et d'autres infections. Il est évident qu'il faut faire appel au service d'un acupuncteur aux méthodes éprouvées avant de s'investir dans une telle approche. Il est illégal de pratiquer l'acupuncture au Québec sans appartenir à l'Ordre professionnel des acupuncteurs du Québec. Il est donc facile de localiser les milieux de pratique des acupuncteurs de notre région.

L'avenir

L'intégration de l'acupuncture aux interventions médicales, pharmacologiques et non pharmacologiques est peut être une chimère. Mais, devant la montée importante des médecines alternatives et complémentaires, il apparaît évident que l'avenir du traitement de la douleur passe par l'intégration d'interventions thérapeutiques de diverses natures. La recherche du bien-être des patients est aussi importante que la prescription de médicaments. Toute méthode prouvée scientifiquement qui permet de soulager la douleur et qui est sans danger devrait avoir sa place en clinique. L'acupuncture en fait maintenant partie dans le combat que mène la médecine contre la douleur. Les aiguilles, longtemps craintes, au mieux, snobées au pire, se sont finalement fait une niche dans les soins de santé occidentaux.

Sources

AUDETTE, J. F. et Ryan. A. H. «The role of acupuncture in pain management», Phys Med Rehabil Clin North America, no. 15, 2004, p 749-772.

MOFFET, H. «How might acupuncture work? A systematic review of physiologic rationales from clinical trials», BMC Complementary and alternative medicine, no 07, juillet 2006.

CLARSSON, C. «Acupuncture mechanisms for clinically relevant effects», German Journal of Acupuncture, 2002: 45:1 9-23.

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