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Aujourd'hui, que signifie Pâques?
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Pour Étienne, six ans, le Dernier repas est le souper. La mort et la résurrection de Jésus sont survenus il y a un nombre incalculable de dodos, et il ne faudra jamais les oublier, lui a-t-on enseigné dans le cours d'éthique et culture religieuse. La dévotion pour la survivance d'un peuple qui a traversé la mer Rouge? Il n'en a cure. Ce dimanche d'avril, la convoitise fait pétiller ses yeux lorsqu'il voit les œufs et lapins en chocolat. C'est Pâques, pas de doute.
Telle est cette fête pour la majeure partie des petits catholiques du Québec. Pour les grands, ce n'est pas bien différent. Ils savourent Pâques en dévorant le sourire radieux de leurs enfants s'emparant des œufs sucrés. La célébration se décline également en repas familial, avec parfois l'agneau trônant au milieu de la table, en chasse aux œufs et, plus rarement, en quête de l'eau de Pâques.
Ces rites «contemporains» font depuis longtemps office de tradition. Si bien que les contours des origines de la fête s'estompent doucement dans les méandres de notre mémoire.Passage vers la liberté
Les racines de Pâques ont émergé de deux terreaux: juif et chrétien. Les deux fêtes ont lieu au début du printemps, mais pas le même jour, et n'ont pas la même signification. La Pâque juive a cependant largement influencé la célébration chrétienne.
La Pâque juive fut d'abord - avant l'époque de Jésus - la fête de l'agneau pascal, que l'on sacrifiait et dont le sang était utilisé pour frotter le pourtour des portes de la tente ou de la cabane pour détourner les mauvais esprits et protéger ainsi la famille pendant toute l'année.
«Pâque fut ensuite la célébration du souvenir de la libération du peuple hébreu, qui était esclave de l'Égypte et qui a traversé la mer Rouge, indique Jean-Claude Breton, professeur agrégé à la faculté de théologie et de sciences des religions à l'Université de Montréal. La «nouvelle Pâque» fut par la suite rattachée à la libération du pécheur qui ne se croyait pas à la hauteur de sa foi», poursuit-il.
Les chrétiens célèbrent pour leur part la mort (Vendredi saint) et la résurrection (dimanche de Pâques) de Jésus à partir de l'an 33. La célébration de la Cène, le dernier repas de Jésus avec ses disciples, est devenue le principal rite chrétien, signale Monsieur Breton. «C'est une fête majeure, que l'on soit juif, orthodoxe ou d'une autre religion», souligne-t-il.
Le nom associé à cette célébration a plus d'une source, mais la racine qui lui est le plus couramment associée est le mot hébreu qui signifie «passer» ou «passage», traduit en latin pascha. On fait généralement référence au «passage vers la liberté» du peuple hébreu, c'est-à-dire la traversée de la mer Rouge.
Baptême, poisson et cocos
Il y a quelques décennies que nos rites de Pâques ont brisé les liens qui les rattachaient à sa création. Il en est toutefois un, instauré vers le 4e siècle, qui a persisté pendant quelques siècles: le Carême. Encore aujourd'hui, certaines personnes observent une forme de Carême en choisissant de se priver d'un aliment ou d'une activité qu'ils aiment pendant 40 jours. Un évêque italien a ainsi suggéré cette année à ses paroissiens de se priver de textos les vendredis pendant cette période.
«À l'origine, c'était le temps de la préparation des personnes qui allaient être baptisées avant Pâques, relate le professeur Breton. Puis, cette période est devenue un temps de pénitence: il fallait souffrir pour s'associer aux souffrances du Christ. Quand les catholiques ont commencé à être du côté du pouvoir, on a valorisé la pénitence pour elle-même, sans objet», explique-t-il.
Le poisson au menu du repas du soir du vendredi est une coutume héritée des dominicains (13e siècle), qui s'abstenaient de se gaver de viande rouge - le festin des riches - en avalant la pitance des pauvres - le poisson - en signe «d'empathie». Le hic, ajoute Jean-Claude Breton, c'est qu'en ajoutant le saumon, les pétoncles et autres crustacés et fruits de mer au menu, on s'éloignait de la nourriture des pauvres. La pratique fut abandonnée.
Folklore et mercantilisme
Petit à petit, des rites «secondaires» se sont greffés aux rites religieux et à la célébration eucharistique, dont l'eau et les œufs de Pâques.
La quête et la conservation de l'eau de Pâques serait une coutume d'ordre... folklorique, voire superstitieux, soutient le professeur Breton. «Comme le baptême nous donne accès à Dieu et que l'eau y est associée parce qu'elle est bénie, on attribue à cette dernière des vertus divines», explique-t-il. Selon la tradition chrétienne, la cueillette de l'eau de Pâques se fait en eau courante, avant le lever du soleil, le jour de la Résurrection du Christ.
Et les cocos? Il fut pendant des siècles interdit de manger des œufs pendant le Carême. On s'en donnait alors à cœur joie à Pâques. Sans compter le fait qu'avant l'existence de la réfrigération, l'œuf s'avérait le seul produit frais à consommer en saison douce, signale Monsieur Breton.
Quant à leur décoration, il s'agit d'une tradition née bien avant l'ère chrétienne. Les œufs étaient colorés, bénis et échangés dans le cadre des rites soulignant l'arrivée du printemps. L'œuf était le symbole de la renaissance avant de devenir celui de la résurrection du Christ. Sa décoration fut par la suite mise en valeur en Europe centrale. On doit aux immigrants allemands établis au Canada le personnage du lapin de Pâques qui apporte les œufs colorés aux enfants sages. La chasse aux œufs de Pâques cachés dans la maison ou dans le jardin est une coutume universelle.
Le sens religieux des fêtes de Pâques est aujourd'hui quasi évincé, et ces célébrations revêtent surtout un caractère commercial. Faut-il alors les supprimer? Au dire du professeur Breton, il subsiste un espoir de récupérer une part du message chrétien «afin que Pâques éclaire le reste de l'année».
Le saviez-vous?
Le jour de Pâques a été fixé pour la première fois en 325, lors du concile de Nicée: il a lieu le premier dimanche après la pleine lune qui suit le 21 mars, qui est habituellement la date de l'équinoxe du printemps. Toutefois, comme la chrétienté utilise deux calendriers différents, julien et grégorien, la datation diffère dans ses églises... En 2009, les catholiques fêtent Pâques le 12 avril. Les Juifs célèbrent Pâque dès le 9 avril, et la fête dure sept ou huit jours. Chez les orthodoxes, les églises d'occident célèbrent Pâques le 12 avril, et les celles d'orient, le 19.
Sources
Lexilogos
La petite histoire des œufs de Pâques, Fédération des producteurs d'œufs de consommation du Québec
Telle est cette fête pour la majeure partie des petits catholiques du Québec. Pour les grands, ce n'est pas bien différent. Ils savourent Pâques en dévorant le sourire radieux de leurs enfants s'emparant des œufs sucrés. La célébration se décline également en repas familial, avec parfois l'agneau trônant au milieu de la table, en chasse aux œufs et, plus rarement, en quête de l'eau de Pâques.
Ces rites «contemporains» font depuis longtemps office de tradition. Si bien que les contours des origines de la fête s'estompent doucement dans les méandres de notre mémoire.Passage vers la liberté
Les racines de Pâques ont émergé de deux terreaux: juif et chrétien. Les deux fêtes ont lieu au début du printemps, mais pas le même jour, et n'ont pas la même signification. La Pâque juive a cependant largement influencé la célébration chrétienne.
La Pâque juive fut d'abord - avant l'époque de Jésus - la fête de l'agneau pascal, que l'on sacrifiait et dont le sang était utilisé pour frotter le pourtour des portes de la tente ou de la cabane pour détourner les mauvais esprits et protéger ainsi la famille pendant toute l'année.
«Pâque fut ensuite la célébration du souvenir de la libération du peuple hébreu, qui était esclave de l'Égypte et qui a traversé la mer Rouge, indique Jean-Claude Breton, professeur agrégé à la faculté de théologie et de sciences des religions à l'Université de Montréal. La «nouvelle Pâque» fut par la suite rattachée à la libération du pécheur qui ne se croyait pas à la hauteur de sa foi», poursuit-il.
Les chrétiens célèbrent pour leur part la mort (Vendredi saint) et la résurrection (dimanche de Pâques) de Jésus à partir de l'an 33. La célébration de la Cène, le dernier repas de Jésus avec ses disciples, est devenue le principal rite chrétien, signale Monsieur Breton. «C'est une fête majeure, que l'on soit juif, orthodoxe ou d'une autre religion», souligne-t-il.
Le nom associé à cette célébration a plus d'une source, mais la racine qui lui est le plus couramment associée est le mot hébreu qui signifie «passer» ou «passage», traduit en latin pascha. On fait généralement référence au «passage vers la liberté» du peuple hébreu, c'est-à-dire la traversée de la mer Rouge.
Baptême, poisson et cocos
Il y a quelques décennies que nos rites de Pâques ont brisé les liens qui les rattachaient à sa création. Il en est toutefois un, instauré vers le 4e siècle, qui a persisté pendant quelques siècles: le Carême. Encore aujourd'hui, certaines personnes observent une forme de Carême en choisissant de se priver d'un aliment ou d'une activité qu'ils aiment pendant 40 jours. Un évêque italien a ainsi suggéré cette année à ses paroissiens de se priver de textos les vendredis pendant cette période.
«À l'origine, c'était le temps de la préparation des personnes qui allaient être baptisées avant Pâques, relate le professeur Breton. Puis, cette période est devenue un temps de pénitence: il fallait souffrir pour s'associer aux souffrances du Christ. Quand les catholiques ont commencé à être du côté du pouvoir, on a valorisé la pénitence pour elle-même, sans objet», explique-t-il.
Le poisson au menu du repas du soir du vendredi est une coutume héritée des dominicains (13e siècle), qui s'abstenaient de se gaver de viande rouge - le festin des riches - en avalant la pitance des pauvres - le poisson - en signe «d'empathie». Le hic, ajoute Jean-Claude Breton, c'est qu'en ajoutant le saumon, les pétoncles et autres crustacés et fruits de mer au menu, on s'éloignait de la nourriture des pauvres. La pratique fut abandonnée.
Folklore et mercantilisme
Petit à petit, des rites «secondaires» se sont greffés aux rites religieux et à la célébration eucharistique, dont l'eau et les œufs de Pâques.
La quête et la conservation de l'eau de Pâques serait une coutume d'ordre... folklorique, voire superstitieux, soutient le professeur Breton. «Comme le baptême nous donne accès à Dieu et que l'eau y est associée parce qu'elle est bénie, on attribue à cette dernière des vertus divines», explique-t-il. Selon la tradition chrétienne, la cueillette de l'eau de Pâques se fait en eau courante, avant le lever du soleil, le jour de la Résurrection du Christ.
Et les cocos? Il fut pendant des siècles interdit de manger des œufs pendant le Carême. On s'en donnait alors à cœur joie à Pâques. Sans compter le fait qu'avant l'existence de la réfrigération, l'œuf s'avérait le seul produit frais à consommer en saison douce, signale Monsieur Breton.
Quant à leur décoration, il s'agit d'une tradition née bien avant l'ère chrétienne. Les œufs étaient colorés, bénis et échangés dans le cadre des rites soulignant l'arrivée du printemps. L'œuf était le symbole de la renaissance avant de devenir celui de la résurrection du Christ. Sa décoration fut par la suite mise en valeur en Europe centrale. On doit aux immigrants allemands établis au Canada le personnage du lapin de Pâques qui apporte les œufs colorés aux enfants sages. La chasse aux œufs de Pâques cachés dans la maison ou dans le jardin est une coutume universelle.
Le sens religieux des fêtes de Pâques est aujourd'hui quasi évincé, et ces célébrations revêtent surtout un caractère commercial. Faut-il alors les supprimer? Au dire du professeur Breton, il subsiste un espoir de récupérer une part du message chrétien «afin que Pâques éclaire le reste de l'année».
Le saviez-vous?
Le jour de Pâques a été fixé pour la première fois en 325, lors du concile de Nicée: il a lieu le premier dimanche après la pleine lune qui suit le 21 mars, qui est habituellement la date de l'équinoxe du printemps. Toutefois, comme la chrétienté utilise deux calendriers différents, julien et grégorien, la datation diffère dans ses églises... En 2009, les catholiques fêtent Pâques le 12 avril. Les Juifs célèbrent Pâque dès le 9 avril, et la fête dure sept ou huit jours. Chez les orthodoxes, les églises d'occident célèbrent Pâques le 12 avril, et les celles d'orient, le 19.
Sources
Lexilogos
La petite histoire des œufs de Pâques, Fédération des producteurs d'œufs de consommation du Québec